ALFAJR QUOTIDIEN – Journal d'information quotidien comorien

La notabilité comorienne, d’une époque à l’autre

Souffrant, l’archipel des Comores était pendant longtemps asymptomatique.  Malgré les évènements douloureux et les revirements inattendus… qui l’ont tourmenté, il a pu garder son silence donc vivre sans cri ni gémissement durant des années. Mais avec le nouveau climat qu’il traverse, ce petit archipel dégage des symptômes effroyables. Et celui qui devrait lui assurer les soins pour son rétablissement est pareillement atteint par une grave maladie. Et le désespoir cause l’effroi.

« C’est bien la notabilité. » qui est gravement entamée. Actuellement sur le sol comorien, cette classe qui devrait être composée des hommes riches de sérénité, de probité, d’élégance, de savoir culturel et « cultuel »… et d’un aspect atypique, est rendue une tanière de « qui peut…».

« Utiles étaient ces dignitaires »

Des générations pourront témoigner le rôle joué par des grands hommes non par la taille mais par le charisme, ces apôtres de la Paix, il y a quelques décennies. Et surtout d’un comportement particulier, même si variant selon les points de vue. Ces avocats des exclus, ces protecteurs… de nos localités, de nos régions, voire même de notre pays…, sont un système de valeur adopté par des dignitaires de ces milieux précités. Donc leur siège n’est pas un choix du hasard. Quelques exemples épiques des rôles joués par la notabilité comorienne d’autrefois : En 1967, lors du conflit qui opposait le président Said Mohamed Cheikh et la région de Mbude dont la cause fut la représentation de cette région à l’assemblée territoriale par le député Mohamed Amoundou de Moroni. Les Mboudéens voulaient être représentés par leur enfant Soidiki Hadji et non par Mohamed Amoundou, dont le choix leur semblait une humiliation. Les notables de Ngazidja, Mzé Ahamada Mfoihaya, Mzé Aliamani, Mzé Said Hachim… et consorts, ont usé leur savoir, leur sagesse… leur impartialité, leur art de savoir bien parler pour mater la situation. Donc le calme est revenu. Deuxième exemple, la révision constitutionnelle de Novembre 1989 et sans les notables, rien ne serait fait. Ils se sont rassemblés sans penchant ni étiquètes pour la paix et la stabilité de notre pays. Et pourtant cet un mêlé des pros et des contres le pouvoir…, mais ce qui prévalait chez eux c’est l’intérêt de la nation. C’est ainsi que Mzé Hamada Mboréha, Mzé Mouigni Mondoha, Mzé Said Yassine, Mzé Said Mohamed Abdourahmane, Mzé Ahmada ben Ahmed (Paquet)…, et consorts ainsi que leurs frères des autres iles ont réuni les politiques du moment pour trouver une solution. Enfin en 1992, les notables de Ngazidja se sont réunis à Ikoni et ont trouvé une solution d’une crise entre Ikoni et Moroni dont l’origine est le terrain de Maluzini. Ce groupe social des personnalités d’un rang important a su sans faillir maintenu la paix, la tranquillité et la dignité dans notre pays. Ces hommes de valeur sont même parmi les artisans de l’indépendance des Comores. « Mgu nawarehemu ».

« Une institution en faillite »

Ces derniers temps, ce précepte qui jadis a été composé des irréprochables qui ont su garantir les « us et coutumes » aux comoriens, se trouve en faillite des valeurs. Prise pour un tremplin depuis le niveau local, la notabilité devient présentement un refuge ou un lieu de plaisance. Et les « écharpes » se bousculent pour atteindre à cette classe. C’est un art, bien sûr et pour qu’on soit artiste il faut un enseignement, une patience, et une conviction. Surtout attendre le moment opportun car « Rien n’est plus fort qu’une idée qui arrive à son heure », disait Victor Hugo. Et pourtant nombreux sont ceux qui croient que seul l’écharpe, est une garantie notable pour devenir notable.

Colonel Azali a compris. Cernant la nocivité de cette classe de ces dernières années, il marche sur sa tête. Commençant par la médire, et l’hypnotiser… puis enfin la rendre vulnérable en la divisant. Et soudain l’incohérence. Cela pousse une bonne partie des comoriens à se demander en vérité le sens de ce mécanisme ces heures-ci. Ces hommes qui chaque rencontre se réclament sans équivoque piliers du pouvoir en place en louant délibérément le colonel Azali, comme si l’on loue le prophète. Cette classe, qui devrait être objectif pour le bien être des comoriens, moment où le pays est rongé par une crise de tous genre, se converti en hommes de la cour. Une soumission qui met tout un peuple en danger. Ça devrait donc être le dernier recours, mais hélas. Peuple martyrisé, liberté gommée, meurs attentées, viols sur des mineurs, assassinats perpétuels, injustice dominatrice… Donc un peuple livré à lui-même. Et tout cela au vue et au su de cette classe, cautionnant le règne de « Fe-zinda ».

Said Yassine Said Ahmed

(Ecrivain) Rhône-Alpes

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