ALFAJR QUOTIDIEN – Journal d'information quotidien comorien

Elections 2024 : Quel rôle pour les médias Comoriens ?

Les médias ont toujours eu un rôle important dans le processus électoral : présentation des candidats et de leurs programmes pour ceux qui en ont un, couverture et retransmission des meetings et débats éventuels, annonce des résultats provisoires et définitifs… Mais cette fois, on leur demande un peu plus d’engagement pour aider à défendre l’émancipation démocratique de notre pays.

Nul n’ignore le contexte politique extrêmement tendu dans lequel arrivent ces élections. Entre le boycott des uns, la méfiance des autres envers les institutions impliquées dans le processus, et l’arrogance des proches du régime, tous les ingrédients sont réunis pour que la situation explose à tout moment.

D’où la nécessité d’une implication forte de toutes les forces susceptibles d’apporter l’apaisement attendu et de contribuer au rétablissement de la confiance, du dialogue et du consensus politique pour la crédibilité de cette élection et la paix dans le pays.

Naturellement, on attend un engagement fort des médias et des journalistes dans l’éducation électorale de la population et la transparence quant à la gestion du processus. On a besoin de leur objectivité dans le traitement de la campagne et la répartition équitable du temps de parole, mais surtout dans la sensibilisation des électeurs sur la nécessité de l’accomplissement de l’acte citoyen dans des conditions libres et démocratiques.

Dans un contexte comme celui d’aujourd’hui, nos journalistes doivent être aux avant-postes pour protéger l’expression du peuple dont ils sont censés être les témoins et les porte-voix. Ils ont un rôle informatif significatif dans ce sens. C’est souvent constaté qu’en période électorale certains médias tombent facilement dans la manipulation. Et on est conscient de la situation de précarité qui frappe lourdement cette profession. Mais rien ne changera comme c’est le cas de la vie de tous les Comoriens, si on renonce au combat pour la démocratie et le respect des droits du peuple. Le glas sonnera toujours et encore pour tout le monde. Même pour ceux qui pensent être protégés par le système.

Depuis des années, on a abandonné le sort des résultats de nos élections à des organes dont les membres n’ont aucun compte à rendre, aucune responsabilité ni redevabilité, obéissant, au doigt et à l’œil, aux autorités qui les ont nommés. Ils choisissent en guise de remerciement les gouvernants au lieu de faire respecter le verdict des urnes et faire dire la loi en toute indépendance comme le souhaiteraient le peuple comorien et la communauté internationale. Cela n’est pas concevable dans une démocratie respectable, et on voudrait désormais en construire une en Union des Comores. Mais d’abord, il faut que l’on soit capable de sécuriser et protéger l’expression du peuple, seule arme pour l’alternance et la consolidation de la démocratie.

En l’absence d’instituts de sondage pour nous révéler en avance les tendances de l’opinion, les médias doivent constituer un consortium pour travailler sur le résultat des élections. Les électeurs comoriens ont besoin de connaitre clairement le candidat ou la candidate qu’ils ont choisi. C’est un droit absolu. Un résultat fiable issu des urnes rendu public par un organe indépendant dirigé par la société civile redorerait le blason de notre politique et crédibiliserait nos élections.

Hélas, personne aujourd’hui ne fait confiance aux résultats provisoires de la CENI ni aux résultats définitifs de la Cour suprême. Ces institutions sont considérées, à bien des égards, comme les appendices du système et des autorités en place. Il revient donc aux organes médiatiques, privés et publics, aux syndicats des journalistes, appuyés par des ONGs de s’organiser pour répondre à ce besoin vital pour notre démocratie.

Des journalistes respectant l’éthique et la déontologie de leur profession, comprenant l’importance et le rôle des médias dans la construction et la conservation d’un système démocratique sont capables d’agir ainsi objectivement, afin de sauver la cohésion et l’unité nationales, jusqu’ici mises à mal par les dirigeants successifs de notre pays.

ALI MMADI

alimmadi@yahoo.fr

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