La décision du gouvernement de modifier les horaires de travail dans l’administration publique, entrée en vigueur ce lundi, suscite un débat passionné au sein de la société comorienne. Si certains y voient une adaptation nécessaire aux réalités modernes, d’autres, notamment parmi les prédicateurs religieux (ulémas), s’y opposent fermement particulièrement en ce qui concerne la journée du vendredi.
Au sein même des ulémas, les avis sont partagés. D’un côté, certains religieux ne voient pas d’objection majeure à l’application de ces nouveaux horaires. De l’autre, plusieurs voix s’élèvent pour dénoncer une atteinte aux pratiques religieuses, appelant le gouvernement à revenir sur sa décision. Les opposants rappellent l’importance spirituelle du vendredi dans la tradition musulmane.
« Nous n’accepterons pas le changement de l’heure de la prière du vendredi, car celle-ci a un moment bien défini. Nous continuerons de suivre le calendrier habituel des prières », a affirmé le prédicateur Bahaou. Chaque camp puise dans les textes religieux pour défendre sa position. Le Dr Saïd Bourhane, favorable à la réforme, invoque un verset du Coran :
« Ô vous qui avez cru ! Quand on appelle à la prière du vendredi, accourez à l’invocation d’Allah et laissez tout négoce. Cela est bien meilleur pour vous, si vous saviez. Puis, quand la prière est terminée, dispersez-vous sur terre et recherchez les bienfaits d’Allah, et invoquez-Le souvent afin que vous réussissiez. »
Mais cette interprétation ne convainc pas les prédicateurs opposés à la réforme, qui rappellent les mérites spirituels de ceux qui se rendent tôt à la mosquée le vendredi : « Un chameau pour celui qui y va dès 7 h, un bœuf à 8 h, un mouton à 9 h, un coq à 10 h et un œuf pour celui qui arrive à 11 h », ont-ils précisé.
Au-delà du débat religieux, les critiques pointent également une contradiction avec la Constitution, qui consacre l’islam comme religion d’État sous le rite chaféite. Selon eux, la nouvelle organisation du temps de travail ne respecte pas cet ancrage religieux. Ils appellent ainsi à faire du vendredi un jour férié officiel, en remplacement du samedi et du dimanche : « Nous demandons au gouvernement de reconnaître le vendredi comme jour de repos, conformément à nos valeurs et à notre identité religieuse », plaident-ils.
Entre conservateurs, traditionalistes et partisans du pouvoir, la société comorienne apparaît profondément divisée sur cette réforme. La balle est désormais dans le camp du gouvernement, qui devra choisir entre maintenir sa décision ou ouvrir un espace de dialogue en vue d’un compromis.
Kamal Saïd Abdou









