ALFAJR QUOTIDIEN – Journal d'information quotidien comorien

Opinion : La terreur comme mode de gouvernance !

« Je continue de penser que la meilleure façon de gagner, pour un homme politique, est de mettre en œuvre  ses idées afin de prouver, concrètement, d’après les résultats   obtenus, qu’elles sont bonnes pour son pays.  Hélas, la plupart du temps,  le combat politique  se résume à une lutte sans merci et sans scrupules pour détruire le camp d’en fasse ». (CHRISTIAN PROUTEAU, au service du  président, édition Michel  LAFON  Paris juin 1999).

Le directeur de cabinet  de la présidence de la république  a dépassé  la ligne rouge : en menaçant  de mort  l’opposition, notamment les différents leaders  en déclarant  plus précisément  que « celui qui osera parler  et demander  le respect de la tournante   pour l’année  2021, doit savoir  à l’ avance, à ses risques  et périls  qu’il joue  avec le feu, voire  la mort tout court. » ces propos ne nécessitent, aucun commentaire ; cependant  celui qui déclare  cette  énormité, n’est ni un ignorant, ni un petit  va  pieds- nus , c’est un Ministre  directeur de cabinet, chargé de la défense, donc  un grand responsable, respectable et, de cela, ses paroles tirent un poids particulier ; Néanmoins, je constate qu’il est allé loin , trop loin, il ne présente  aucune idée  de paix, aucune idée nouvelle, il ne prouve pas non plus le moindre résultat obtenu durant son pouvoir, mais il tente de semer une terreur aveugle ,livre une lutte  sans merci et sans scrupules aux nombreux leaders de l’opposition.

On peut se demander  pourquoi cette terreur, cette violence ?

Aujourd’hui, le métier et le destin  de nos gouvernants ne sont plus ce qu’ils étaient. Il s’agit d’une évolution qui a changé la donne politique aux Comores et dans plusieurs pays d’Afrique depuis 1990,  date pendant laquelle, la démocratie a fait  bouger le monde politique et leurs tenants.

 Jusqu’à il y a peu, la plupart du temps, un chef d’Etat  en exercice, un premier ministre ou un ministre tout court, était  un homme respecté ou craint ; il continuait de bénéficier d’égards et  considérations  après avoir quitté le pouvoir, y compris dans les cas où c’est  le pouvoir  qui  l’avait  quitté. Même lorsqu’elle a été  acquise par la force et à la suite d’un coup d’Etat, par exemple, la fonction dotait son titulaire, du jour au lendemain, d’une  aura unique… qui survivait souvent à la perte du pouvoir.

 Aujourd’hui, tel n’est pas le cas : il suffit  d’observer ce qui arrive à l’Ancien  Président Ahmed ABDALLAH Mohamed SAMBI pour ne citer que lui. Demain, certainement, d’autres seront appelés à rendre  des comptes devant le peuple et les juridictions respectives en fonction de leurs actes, leurs missions s’ils étaient conformes à la loi et aux règles institutionnelles.

 C’est pourquoi, chaque gouvernant douteux ne peut qu’afficher un degré  de violence pour dissuader  l’opposition de rester calme. Il veut s’accrocher  au pouvoir parce qu’il craint le  pire et, parfois, l’inattendu.

 Qui aurait pu imaginer quelques  années avant que les gouvernants d’hier, allaient être injectés d’une manière criante  aujourd’hui ?

 Ainsi pour échapper à toute situation inattendue (poursuite judiciaire, accusation parfois sans fondement, indexation  de telle ou telle  autorité, tel homme politique, etc…) la solution, sera de pousser le plus loin possible, le départ des gouvernants actuels.

 Ce qui peut que renforcer en eux  la tentation de rester le plus longtemps  possible (2030 par exemple) dans une fonction qui, bien qu’exposé, reste la seule à garantir à celui qui la détient une immunité  quasi certaine. Si nous voulons que ceux qui l’ont conquise ne disent pas « j’y suis, j’y reste », il faut leur offrir  une sortie honorable, c’est- à- dire le respect  de la loi   et de tout les textes constitutionnels.

Cependant je l’avais dit, l’évolution politique a changé chez nous depuis les années 1990, mais aussi à l’échelle internationale : les mauvais gouvernants ont moins  d’amis et encore moins de pays refuges. Leurs crimes, leurs  détournements  de fonds publics ne sont plus oubliés encore moins pardonnés. Leurs actes  les suivent  sans prescription, leurs victimes, les traquent  sans rémission. C’est là une excellente évolution.  Excellente  parce que dissuasive : si le « métier de gouvernant » conduit à une fin de paria, il suscitera moins  de vocations. Ce qui  est arrivé à plusieurs dictateurs étrangers, pourra bien,  demain, arrivé à nos gouvernants. A l’heure où j’écris ces quelques  lignes, j’apprends que l’Ancien  Premier Ministre  de la République Française, Monsieur François Fillon, sera jugé dans une semaine aux correctionnelles pour  des affaires de corruption, de détournements de fonds publics.

 Pour conclure, j’estime que la situation est grave. A mon avis, c’est qu’il faut, c’est une nouvelle pensée, une logique de paix profitable à notre pays, donc à nous tous.

Prions pour la paix et que Dieu bénisse les Comores.

 

Dr Djaffar MMADI, universitaire, ancien Ministre

 

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