Coralie Frei, écrivaine et poète comorienne n’a pas choisi ces deux courants. Dans une interview, Coralie Frei a souligné qu’ils se sont imposés à lui et font partie de lui, de son quotidien et de son être. Interview.

Vous avez obtenu votre baccalauréat option philosophie et vous êtes infirmière de carrière. Pourriez-vous nous parler un peu de ce revirement ?
D’abord, j‘ai fait un baccalauréat littéraire, option philosophie. Après le baccalauréat, j’ai suivi des études universitaires en littérature française et langues dont l’anglais et l’espagnol que j’ai abandonné en cours de route. Après trois années d’études, mes diplômes universitaires me destinaient à l’enseignement secondaire, en littérature et langues cela va de soi. Mais voilà, prenant en considération mes expériences scolaires précédentes (secondaires notamment), j’en ai conclu que je n’étais pas faite pour un tel poste. L’enseignement d’accord, mais maternel, voire primaire, souhait qui m’a été décliné soi-disant à cause de mon niveau scolaire, « j’allais prendre la place d’un autre », répondait-on à mes innombrables demandes d’emploi. C’est ainsi que sur un coup de tête, j’ai pris la décision de changer d’orientation et me suis donc dirigée vers le paramédical.
Romancière puis poète, qu’est-ce qui vous a incité à choisir ces deux courants ?
Plutôt romancière et poète. Les deux en même temps et non l’un après l’autre. Selon moi le roman et la poésie sont inséparables, ils se complètent. Tous deux sont de belles lettres, une littérature agréable, facile à ingérer. D’ailleurs dans mes romans je glisse toujours quelques poèmes. Pourquoi ai-je choisi les deux courants ? Je ne les ai pas vraiment choisis, ils se sont imposés à moi, font partie de moi, de mon quotidien, de mon être. Dans le roman comme dans la poésie je me libère, m’extériorise et m’épanouie. Je suis de nature timide et à travers mes écritures je me sens totalement libre, libre d’exprimer mes pensées, mes joies, mes peines, mes soucis, mes frustrations etc. Sans crainte ni contrainte je confie à l’ordinateur pour ne pas dire au papier — puisque de nos jours on écrit sur ordinateur — mes préoccupations, mes batailles, ses victoires et mes succès. Je suis mon maître et mon élève, je n’ai ni employeur ni employé, je n’ai pas d’horaires à respecter, pas d’ordres à donner ni à recevoir et je n’attends pas de salaire en fin de mois.
Dans une de vos œuvres les plus célèbres, « La perle des Comores », vous écrivez ceci : « je veux sortir mon île Anjouan, mes îles Les Comores, de l’anonymat ». Qu’entend-on de cette assertion ?
Un jour, alors que j’étais en long transit à l’aéroport de Dar es Salam en Tanzanie, je me suis hasardée à l’extérieur du bâtiment pour prendre un peu l’air. Je me suis alors confrontée à une chose qui m’a profondément choquée, voire attristée. Sur une grande pancarte il était transcrit ceci en gros caractères noirs sur fond blanc accompagné du drapeau comorien : « Comoros the forgotten islands … » (Les Comores, les îles oubliées). Ce jour-là j’ai pris la décision de contribuer, à travers ma plume, à porter mes îles à la connaissance des pays à ma portée. Ceci sans rien d’autre en attendre. Par exemple, en Suisse où je réside depuis 28 ans, une toute minorité connaissait l’existence des Comores lors de mes débuts dans le pays. Grâce à mes œuvres et mes nombreuses présentations, mes îles sortent petit à petit de l’anonymat, du moins dans la région où je réside. D’ailleurs, mon livre en question portait au départ le titre de L’inconnue de l’océan. « La perle des Comores » est un titre suggéré par mon éditeur qui, selon lui, mettait mieux en exergue le pays que je tentais de faire connaître. Petite parenthèse, le titre allemand est : «Weit wie der Ozean» (Loin comme l’océan).
Vous avez divorcé avec votre mari comorien et avez ensuite choisi un étranger, quelles sont vos raisons ?
Je n’ai pas divorcé d’un Comorien pour choisir un étranger. J’ai tout simplement mis fin à une relation qui ne me convenait pas. Je n’ai pas non plus choisi un étranger pour quelque raison que ce soit. J’ai répondu tout simplement « oui » à l’amour vrai, celui qui réunit tous les critères d’une relation saine et viable : la tendresse, l’amitié, la compréhension et le soutien mutuels, le partenariat, la complicité. Comorienne ou pas, la nationalité de mon partenaire m’importe peu de l’instant où il est disposé à m’offrir ce que j’attends de lui.
Propos recueillis par Kamal Said Abdou









