Après la hausse des prix des produits pétroliers par le gouvernement comorien, Said Ahmed Said Abdillah, un économiste, a répondu à nos questions. Selon lui, le peuple ne peut pas se laisser berner par des crises qui ne leurs concerne que de loin mais le gouvernement profite pour augmenter ses recettes afin mieux assurer leurs propres quotidiens au détriment des Comoriens.

Le gouvernement a revu en hausse les prix des produits pétroliers. Comment jugez-vous cette mesure ?
Nous subissons actuellement la conséquence économique de la guerre en Ukraine qui a été initié par la Russie de Vladimir Poutine. La plupart des pays de l’Europe, y compris la France, dépend du Gaz et du pétrole de la Russe. Les Comores ne sont pas directement impactées par les problèmes de pétrole Russe, à notre connaissance, comme l’Europe. Nous sommes des victimes collatérales de cette guerre en Ukraine et la hausse des prix des produits pétroliers et alimentaires. Mais, aussi, nous connaissons nos dirigeants politiques d’hier et d’aujourd’hui, dès qu’il y a un problème mondiale qui pourrait leur donner une occasion de pleurer et tendre la main en tordant le coup du peuple comorien, ils n’hésiteront jamais de sauter sur l’occasion. C’est ceux qu’ils ont fait suite aux cyclones Kenneth qui a frappé notre pays et la crise sanitaire de covid-19 qui a frappé le monde entier. Le peuple comorien a souffert et certains ont perdu les membres de leurs familles à cause du covid-19 mais il n’a jamais vu la couleur des aides internationale, de la Banque mondiale et autres institutions financières que l’Etat Comorien a obtenu. Le gouvernement Comorien a répercuté immédiatement la hausse des prix des produits pétroliers dans notre pays sans chercher d’autres alternatives. Or nous savons qu’il y a au moins trois solutions pour éviter la hausse des prix des produits pétroliers qui ne nous concernent pas directement. La première est de suspendre d’une manière temporaire les taxes perçus par l’Etat sur les produits pétroliers. Cette mesure aurait permis d’éviter une suite vertigineuse des hausses des prix des transports (taxis et autres) et des produits alimentaires. C’est agissant à la source du problème qu’on peut éviter le peuple comorien de souffrir encore plus. La deuxième solution est que l’Etat subventionne les hydrocarbures en demandant aux stations-services de garder les mêmes prix. C’est la solution qui a été adoptée par le gouvernement Français dirigé par Emmanuel Macron pour freiner l’augmentation des prix des carburants. Dans notre pays, contrairement à la France par exemple, l’Etat a le monopole de la distribution des produits pétroliers. Le gouvernement n’aura pas beaucoup des difficultés à agir dans ce sens. La troisième solution est de diminuer de 30 % les salaires et les trains de vie du président, de ses conseillers, de ses ministres et directeurs généraux des sociétés d’Etats afin d’augmenter de 30 % les bas salaires du public et privé pour qu’ils puissent survivre.
Selon vous cette augmentation n’impactera pas l’économie du pays ?
Les produits pétroliers sont le pilier de la vie de l’économie de notre pays. Il ne faudrait pas oublier que notre énergie est alimentée par des groupes électrogènes dépendant des produits pétroliers. Il y aura par conséquent une augmentation des prix de l’électricité, des transports et des produits alimentaires. Il n’y aura pas seulement d’augmentation des prix mais, par la suite des pénuries des denrées alimentaires qu’on doit y méditer avant que cela nous frappe.
Que proposez-vous pour que le citoyen ne se sente pas léser ?
Comme je viens de vous l’indiquer le gouvernement a au moins trois solutions à sa portée au lieu de pleurer et d’attendre des aides qui risquent de ne jamais venir. Si le gouvernement Comorien n’intervient pas en suspendant d’une manière temporaire, ou de subventionner la vente du carburant ou de diminuer les salaires des hauts dirigeants du pays de 30 % en augmentant les bas salaires du public et privé, c’est au peuple comorien de savoir de ce qu’il peut encore endurer. C’est le peuple qui paie les aveuglements de nos dirigeants politiques d’hier comme d’aujourd’hui. Je dois, peut-être vous rappeler que l’Etat Comorien n’a jamais été, en faveur du peuple mais au service de ses dirigeants politiques et leurs clans. Le peuple ne peut pas se laisser berner par des crises qui ne leurs concerne que de loin mais le gouvernement profite pour augmenter ses recettes afin de mieux assurer leurs propres quotidiens au détriment des Comoriens.
Ne craignez-vous pas une inflation des autres produits dans le pays ?
Nous ne pouvons pas éviter l’inflation des autres produits. C’est une inflation, comme disent les économistes, importés, c’est-à-dire venant de l’extérieur. Cette inflation importée survient sans que la valeur de la monnaie dite des Comores soit dévaluée. Il faudra que le gouvernement trouve une solution palliative pour diminuer l’impact de l’inflation au sein de la population. Cela, aurait dû être le rôle de la banque centrale dite des Comores. Mais cette dernière n’a jamais travaillé en faveur de la population comorienne. On a vu pendant la crise de covid-19 où les différentes banques centrales du monde débloquèrent des milliards pour soutenir leurs économies, la BCC, Banque Centrale dite des Comores, même un centime de franc comorien. Nos dirigeants politiques actuels doivent savoir le principe d’une monnaie est de l’adapter aux différents chocs économiques. Or la monnaie est pilotée par la Banque centrale, qui mène la politique monétaire de notre pays. Elle peut, par exemple pendant cette crise baisser les taux directeurs.
Pour l’insertion des jeunes, comment qualifiez-vous le projet, jeune et emploi ?
J’ai lu sur les réseaux sociaux, comme beaucoup des Comoriens, les décrets présidentiels instaurant ce fond sensé soutenir le projet un jeune et un emploi. Je reste très sceptique et j’espère que ce n’ait qu’une fumigène
Votre dernier mot.
La situation socio-économique de notre pays se dégrade de pire en pire depuis plusieurs années sans que nos dirigeants politiques actuels nous donnent un mirage d’espoir de voie de sortie. Le gouvernement ne peut pas continuer à chaque fois, à masquer ses failles et ses incompétences et surtout manque de plan socio-économique pour sortir notre pays de crise, en accusant le covid-19 hier et la guerre en Ukraine aujourd’hui. Permettez-moi de terminer mes propos sur la parole du général de Gaulle, ancien président de la République française et fondateur de la Vème République, qui disait : « Ce qu’il faut surtout pour la paix, c’est la compréhension des peuples. Les régimes, nous savons ce que c’est : des choses qui passent. Mais les peuples ne passent pas. »
Propos recueillis par KDBA








