Le président du parti Comores Alternatives, Said Ahmed Said Abdillah a, dans cet entretien, répondu à nos questions qui se tournent sur la politique et l’économie. Il appelle à une mobilisation générale contre le régime d’Azali.
Le président du parti Comores Alternatives, Said Ahmed Said Abdillah a, dans cet entretien, répondu à nos questions qui se tournent sur la politique et l’économie. Il appelle à une mobilisation générale contre le régime d’Azali.
Le président Azali a signé un décret attribuant des pouvoirs au secrétariat général du gouvernement bien qu’il soit jugé illégal. Que pensez-vous ?
Je voudrai d’abord vous remercier de m’avoir accordé cette interview, vous et l’équipe de votre journal Al-fajr. Pour votre question très pertinente, je laisse aux juristes de faire leur travail pour juger de la conformité de son décret et de l’attribution du pouvoir présidentiel à son fils qui fait office de secrétaire général du gouvernement. Mais en tant que politicien, je retrouve ce que j’avais dit dans votre colonne dernièrement qu’Azali Assoumani agit comme une souris « en mordant et soufflant » et avance dans son ultime objectif – dicté par ses maitres de la françafrique- celui de vouloir détruire l’unité des Comores en poussant le peuple d’abord à se déchirer en opposant les îles entre elles et en provoquant les comoriens pour créer une guerre civile. Ce maudit décret est une provocation voire même une insulte lancée contre le peuple comorien et surtout les hommes et femmes politiques comoriens de l’opposition et aussi ceux qui sont avec lui qui ne font que courber l’échine. Pourquoi après huit ans- Mai 2016- Août 2024- de pouvoir, aujourd’hui le secrétaire général du gouvernement a eu des attributions des compétences et même un cabinet présidentiel différemment de ses prédécesseurs ? La réponse vous le savez : seul lui et ses cailloux sont dignes de gouverner les Comores. Le comportement d’Azali Assoumani ainsi est dû au moins à trois facteurs : – le premier, et le plus grave, est la désunion des leaders politiques comoriens de l’opposition dont certains croient bêtement arriver au pouvoir par le biais de l’aide de la France qui ne cherche que des ânes pour diriger notre pays. Cette dernière les fait patienter en disant que le tour viendra bientôt jusqu’à leurs enterrements sans y arriver au pouvoir. Si Azali Assoumani se permet d’introniser ses enfants au pouvoir l’un dans l’administration publique, l’autre dans l’armée et une autre à l’Ascena, c’est la faute à nous qui nous disons politiciens et qui ne pensons que vouloir aller prendre la place d’Azali sans combattre. La situation est claire, Azali Assoumani a déclaré la guerre en foulant aux pieds nos institutions et nos dignités alors que nous de notre côté, nous attendons un messie ou la France et pour certains l’opinion internationale qui n’existe pas. C’est un défi que nous politiciens devrons relever, non par des discours ou des conférences de presse ou rassemblement factice ou de culpabiliser les autres sans montrer ce qu’on a fait de mieux, mais en mobilisant tous les moyens possibles pour déloger Azali Assoumani et ses clans du pouvoir par une mobilisation populaire et autres.
-Le deuxième est dû à la complicité de notre armée qui est le protecteur du peuple et de la république et le rempart de la nation. Si nous qui nous disons politiciens avons failli, sommes faibles et apeurés et vous, nos vaillant soldats ? Vous êtes le dernier recours de la nation et vous n’êtes pas sans savoir ce qui se passe dans notre pays et ce qui se prépare. Si le Colonel Azali Assoumani a pu prendre le pouvoir hier et aujourd’hui c’est uniquement qu’en 1995 -lors de sa fuite à l’ambassade de France – l’armée comorienne n’a pas agi en tant qu’un corps militaire discipliné et qui la fait appliquer. Et vous n’êtes pas sans savoir le sort que le colonel Azali Assoumani a réservé au commandant Fayçal, Capitaine Moutu et Major BAPALE. Etes-vous pour le peuple et la nation comorienne ou pour Azali Assoumani et ses clans avec l’appui de la françafrique ? Le moment est venu aujourd’hui où chacun d’entre vous au sein de l’armée nationale de développement (AND) doit faire un choix. Rien n’est éternel sauf Dieu et ce régime macabre et dictatorial chutera d’ici peu avec votre aide ou non, mais nous le saurons et nous agirons ce jour-là en conséquence. Je ne peux que rappeler à nos vaillants soldats ces paroles du général de Gaulle : « La politique la plus ruineuse et la plus couteuse c’est d’être petit… »
-Le troisième est le peuple comorien dont certains se sentent indifférents aux malheurs qui frappent notre pays. Tout changement ne peut se réaliser sans votre contribution morale et matérielle. Le peuple comorien ne doit pas se résumer au « hayassa » – célébration du grand mariage – qui est l’un des fléaux qui plombent notre pays et l’avenir de cette jeune nation. Nous ne sommes pas contre le grand mariage – qui est pour nous une manière de célébrer avec pompe le mariage et rien d’autres – mais la situation de notre pays qui est pris en otage mérite la participation de chacun d’entre nous pour le libérer de la dictature macabre d’Azali Assoumani et ses clans. Aucune excuse n’est tolérée pour le malheur qui frappe notre pays. Nous sommes tous responsables de ce malheur et chacun doit se demander sa part de responsabilité qui a amené notre pays dans une situation sans issue sauf la guerre civile.
Quelle est votre réaction par rapport au projet de loi en examen portant modification du code électoral ?
Qu’est-ce que vous voulez qu’on attende d’un régime macabre dictatorial que la seule volonté est de tout faire pour de diviser la classe politique comorienne et le peuple comorien afin de détruire l’unité des Comores et la nation comorienne ? Il va faire de loi pour que l’assemblée nationale ne soit représentée que par ses courtisans comme c’est le cas aujourd’hui.
Au niveau économique, quelle lecture faites-vous sur le rapport annuel de la banque centrale ?
Il y a une chose que devriez savoir et peut-être que vous le savez déjà : les Comores n’ont pas une banque centrale. Celle qui s’appelle banque centrale des Comores (BCC) est une représentation du trésor publique française aux Comores. Elle collecte les devises (toutes monnaies étrangères -euros, dollars etc.) et l’or pour l’envoyer en France via Mayotte, territoire comorien occupé par la France. Les devises constituent une richesse pour un pays y compris les Comores – qui est déjà pauvre. Si nous avions une banque centrale comorienne pourquoi nous ne gardons pas les devises aux Comores mais l’envoyer en France. Un pays produit et exporte pour avoir des devises et pouvoir acheter à l’extérieur. On lance le tourisme pour que les étrangers viennent chez nous afin d’apporter des devises comme le fait notre diaspora pour enrichir le pays. Mais malheureusement tous nos efforts de production, du tourisme et même les aides ne profitent qu’à la France par le biais de sa monnaie. La colonisation monétaire est la pire de colonie car elle échappe à la compréhension de la masse – l’élite qui la comprend est soit corrompu soit apeuré – et elle est masquée au niveau international par le fameux « accords de coopération » qui n’est autre qu’une colonisation monétaire. Pour avoir une banque centrale nationale, on doit avoir une monnaie nationale. Or la monnaie qui circule aux Comores -qu’on appelle franc comorien – est une monnaie française, imprimée par la France et gérée par la France. Les Comores, par le biais de ladite banque centrale des Comores (BCC) ont un compte auprès du trésor publique français qu’on appelle « compte d’opération ». Nous sommes le seul pays du sud de l’océan indien et de l’Afrique de l’Est qui n’a ni monnaie ni banque centrale. C’est pour vous dire que tous ces rapports et ces déclarations provenant de ladite Banque centrale des Comores ne sont que des mascarades et des fumigènes justes pour essayer de nous dire qu’elle existe. Vous êtes des journalistes surtout des jeunes dans un monde de Google, essayer de vous poser des questions par exemple sur le rôle de la Banque centrale. Et comparer la Banque centrale des Comores et celle de l’île Maurice, le rôle du gouverneur de la banque centrale des Comores et celui de l’île Maurice. En regardant sur le net, vous saurez où est votre pays et vous sensibiliserez le peuple comorien. Il ne suffit pas de pavaner avec des titres mais le fond aussi est important. SI vous ne pouvez pas vous regarder par le miroir, essayez de regarder les autres.
Croyez-vous que le pays ait une croissance économique positive en 2024 avec les coupures et délestages électriques ?
Pour faire des pronostics, surtout sur la croissance économique de notre pays où rien ne fonctionne et toutes les sociétés d’Etats pourvoyeurs d’emplois et des recettes ont été mis en faillite, il faudra être un magicien. La croissance économique d’un pays est calculée – entre autres- sur la base de la production, c’est-à-dire activité régénératrice de revenus. Pour arriver à la calculer, il faudra un service ou une agence spécialisée, comme le service des statistiques au Commissariat au plan qui collecte les données au niveau national et non seulement à Moroni. Les chiffres que donne la fameuse banque centrale dite des Comores sont souvent basés sur des données collectées à Moroni et extrapolées au niveau national. Ce sont donc des chiffres qui sont loin d’être véridiques par rapport à la réalité de notre pays. C’est comme par exemple les chiffres qui ont été communiqués aux instances internationales pour faire des Comores, un pays intermédiaire et que certains dirigeants politiques se sont excités comme des enfants qui croient au père noël. Or on est de loin le pays le plus pauvre du sud de l’océan indien et de l’Afrique de l’Est. Il ne suffit pas de se proclamer lion pour n’est pas être un chèvre mais il faudra aussi être capable de mordre. On n’a ni l’eau potable accessible à tout le monde, ni route, ni électricité et 60% de la population comorienne vivent en dessous du seuil de pauvreté. Nous nous mentons en nous -même qui est la base de la philosophie de « hayassa » -qui se voit comme un roi du pays du golf d’un jour sans le lendemain.
En tant qu’économiste, que proposeriez-vous contre l’inflation galopante et la pénurie du riz ?
La lutte contre l’inflation ne peut pas se décréter mais s’organise par rapport à une politique économique qui signifie politique monétaire et politique budgétaire. Or les Comores n’ont pas de monnaie et ni de banque centrale pour mener une politique monétaire adéquate selon le besoin de notre pays. Et pourtant vous voyez dans le rapport de la banque centrale dite des Comores qui mentionne que parmi leurs trois objectifs, il y a la lutte contre l’inflation. Vous n’êtes pas sans savoir que la lutte contre l’inflation est l’unique objectif assigné par la France via la Banque centrale Européenne à tous ses représentants dans les 15 pays de la zone franc Cfa. Pour lutter contre l’inflation, qui peut avoir plusieurs sources, mérite souvent l’intervention de la Banque centrale or nous n’en avons pas. Le pays va mal, pas seulement de l’inflation mais de l’absence même des produits de premières nécessités telles que le riz comme vous venez de le souligner car le pays n’a aucune politique économique pour développer le pays. Les maigres richesses apportées par la diaspora et la vente de la citoyenneté économique qui apportent des mânes des devises aux Comores mais sont envoyés en France en échange des monnaies locales-des papiers sans valeurs- que nous pouvons produire nous -mêmes. C’est l’un des fléaux qui appauvrissent notre pays cette colonisation monétaire que nous devons s’affranchir rapidement au risque de nous tuer tous.
Votre dernier mot.
Mes derniers mots de cet entretien revient à mes frères, sœurs et amis de la politique comorienne de l’opposition et ceux qui se courbent l’échine autour d’Azali Assoumani et aussi de l’armée nationale de développement (AND). Nous voyons chaque jour la dégradation économique et sociale de notre pays et son isolement total au niveau de l’océan indien à cause de laquelle, aucun pays de la région n’a un vol direct avec les Comores. Je vous appelle à un sursaut national dépassant nos égos et nos partis politiques pour libérer notre pays du régime macabre et dictatorial d’Azali Assoumani dont l’unique objectif est de détruire l’unité des Comores et affamer son peuple pour le rendre servile. Taisons nos différences, oublions nos rêves insensés de vouloir tous être chef, en mobilisons notre peuple, nos énergies et en fédérant nos actions et nos moyens nous y arriverons à sauver notre peuple qui n’a que nous pour le sauver. Le salut appartient à celui qui suit la bonne voie.
Propos recueillis par KDBA