Le Sommet international sur l’intelligence artificielle, qui s’est tenu à Paris les 10 et 11 février 2025, a abouti à une Déclaration commune signée par 61 pays. Ce document met l’accent sur des principes de gouvernance visant à rendre l’IA plus éthique et inclusive, tout en promouvant une régulation internationale renforcée.
Un des objectifs de ce Sommet est de renforcer les partenariats entre États, entreprises et société civile, pour un avenir numérique plus inclusif et durable. Dans son intervention, le Président a souligné l’importance de rendre la gouvernance de l’IA inclusive et éthique, avec un modèle de régulation mondial reposant sur une coopération internationale forte. « La gouvernance de l’IA doit être bénéfique pour tous les peuples, partout dans le monde, » a-t-il affirmé.
Bien que les Comores soient encore aux premières étapes, le pays s’engage activement dans l’intégration de l’IA et de la cybersécurité dans l’éducation, tout en renforçant ses infrastructures numériques. En tant que membre de l’alliance Smart Africa, les Comores contribuent activement à la gouvernance numérique en Afrique. Le Président a également mis en lumière le rôle crucial que l’Afrique doit jouer dans l’IA : « Les pays africains doivent bâtir une gouvernance numérique qui mette l’IA au service des peuples et de
Les objectifs de la Déclaration
Les pays signataires, parmi lesquels figurent des puissances technologiques comme la Chine, la France et l’Inde, ont affirmé leur engagement à éviter une concentration excessive du marché, afin que l’IA ne soit pas contrôlée par une poignée d’acteurs privés ou nationaux. Rendre l’IA accessible, notamment aux pays émergents, pour éviter qu’elle ne creuse davantage les inégalités technologiques. Renforcer la régulation pour encadrer le développement et l’usage de l’IA afin de prévenir les dérives (biais algorithmiques, surveillance de masse, atteintes aux droits fondamentaux).
Cette déclaration s’inscrit dans une volonté de coopération internationale, similaire à d’autres initiatives globales comme le Sommet de Bletchley (novembre 2023) et les efforts de l’ONU en matière de régulation de l’IA.
L’absence des États-Unis et du Royaume-Uni : une fracture géopolitique
L’un des faits marquants de ce sommet est l’absence des États-Unis et du Royaume-Uni parmi les signataires. Cette décision souligne des désaccords profonds sur la gouvernance mondiale de l’IA. Le Vice-président américain, JD Vance, a défendu une approche moins interventionniste, arguant que des régulations trop strictes pourraient freiner l’innovation et limiter la compétitivité des entreprises technologiques. Cette position est alignée avec celle de nombreuses grandes entreprises américaines, qui craignent qu’un cadre réglementaire international trop contraignant leur fasse perdre leur avantage concurrentiel face à des acteurs étrangers plus souples.
Cette divergence illustre une fracture entre deux visions : une approche régulatrice (France, Chine, UE, Inde…), qui vise à encadrer l’IA pour prévenir ses risques et assurer un accès équitable et une approche libérale (États-Unis, Royaume-Uni…), qui privilégie la croissance rapide du secteur, en misant sur l’autorégulation et l’innovation.
Les implications et défis à venir
L’absence des États-Unis et du Royaume-Uni soulève plusieurs questions : Une régulation efficace est-elle possible sans les plus grandes puissances technologiques ? Le risque d’un monde divisé en blocs IA est-il en train de se matérialiser ? (une IA européenne régulée, une IA américaine plus libre, une IA chinoise sous contrôle d’État). Les entreprises devront-elles jongler avec plusieurs cadres réglementaires en fonction des régions du monde ?
Ce sommet marque une avancée notable vers une gouvernance mondiale de l’IA, mais l’absence d’un consensus universel laisse présager des tensions et des rivalités croissantes dans la définition des règles du jeu technologique.
Notre pays est à la croisée des chemins. Les pénuries d’électricité récurrentes pour ne pas dire permanentes, loin d’être de simples désagréments, minent notre économie et compromettent notre développement. Selon le dernier communiqué de la Sonelec portant programme provisoire de distribution de l’électricité à Moroni, des régions entières de la capitale et de ses environs resteront dans le noir entre 9h et 17h, malgré la présence dans ces zones de (PME) petites et moyennes entreprises de production. Quel avenir pour ces entreprises et quel soutien prévu pour la circonstance. Dans ce même communiqué, rien ne laisse transparaitre une lueur d’espoir d’un retour à la normale dans un avenir proche. Pourquoi dans ce cas ne pas alterner les délestages entre les zones de la capitale au lieu de sacrifier une seule partie. Il est donc urgent de sortir de cette impasse et de prendre des décisions audacieuses pour garantir un avenir énergétique durable. Aucun développement n’est envisageable sans énergie.
Pendant des décennies, nous avons pallié les problèmes d’approvisionnement en énergie par des solutions de court terme, coûteuses et inefficaces. L’achat incessant de groupes électrogènes qui plus est de secours, dont la maintenance est souvent déficiente faute de compétences, est devenu une habitude qui nous a menés dans un cul-de-sac.
L’investissement dans les énergies renouvelables, notamment le solaire, est une initiative louable. Cependant, le choix des sites d’installation des premières centrales photovoltaïques s’est avéré peu judicieux. En concentrant ces installations dans des zones déjà faiblement alimentées dans la journée par la Sonelec, nous n’avons fait que déplacer le problème sans le résoudre.
La capitale, poumon économique du pays, souffre particulièrement de cette absence totale d’éléctricité. Le communiqué de la Sonelec vient entériner une situation qui date de plus d’un mois avec une partie de la capitale privée d’énergie surtout dans les horaires de travail. Les entreprises, contraintes de fermer leurs portes pendant des journées entières, voient leur productivité s’effondrer et les emplois disparaître. Ce cercle vicieux menace de plonger notre économie dans une spirale descendante. Si ce n’est déjà le cas. D’ailleurs la stagnation de notre taux de croissance pour ne pas dire sa baisse y est fortement liée.
Quelle solution pour sortir de cette impasse ? Ces solutions ne sont pas limitatives mais constituent le meilleur point de départ pour sortir des sentiers battus
Prioriser la capitale : Concentrons nos efforts sur l’installation de grandes centrales solaires à proximité de la capitale. Les économies qui seront réalisées sur le carburant nous permettront de financer d’autres projets et de renforcer la stabilité du réseau.
Renforcer les capacités de la SONELEC : Formons le personnel, investissons dans des outils modernes et mettons en place une gestion efficace de l’énergie. Il est inadmissible qu’à ce jour, il faut faire venir à chaque fois des techniciens étrangers pour réparer les groupes électrogènes. Il est également intolérable de constater qu’il faut des mois pour réparer des groupes électrogènes et pendant ce temps plonger la capitale dans le noir pour une durée indéterminée sans en assumer les conséquences.
Développer un plan énergétique à long terme : Évaluons l’ensemble de notre potentiel énergétique, fixons des objectifs ambitieux. Dimensionnons nos centrales photovoltaïques pour apporter des vraies solutions.
Et pourquoi ne pas s’inspirer de notre île sœur Mayotte ? Mayotte produit environ 134 mégawatts d’énergie électrique dont 39 mégawatts proviennent d’énergie solaire. Pourquoi ne pourrions-nous pas faire de même ?? La Grande Comores dispose plus d’espace que Mayotte. Tout est question de dimensionnement et d’expression des besoins.
Il est temps de sortir de la logique des solutions palliatives et de construire un avenir énergétique durable pour notre pays. L’enjeu est de taille : il s’agit de préserver notre économie, de créer des emplois et d’améliorer le cadre de vie de tous les Comoriens.
Au vu de la situation, la Sonelec ne sera jamais à mesure de maîtriser à court terme l’énergie thermique. Il est donc urgent pour sauver la capitale et ses environs, pour l’intérêt de l’économie du pays, de penser à un plan d’urgence d’installer une centrale photovoltaïque dans la région de bambao.
Il est paradoxal de considérer la fourniture d’électricité pendant le mois de Ramadan comme une prouesse et comme indicateur de performance, alors que c’est précisément à ce moment-là que les entreprises produisent le moins. Cette focalisation sur une période spécifique, souvent au détriment d’autres, montre à quel point nous avons perdu de vue l’objectif principal : assurer une fourniture d’électricité stable et fiable tout au long de l’année. En nous contentant de répondre à la consommation pendant une période particulière, nous perpétuons un système fragile et inefficace. »
L’Archipel des Comores traverse la plus grave catastrophe naturelle de son Histoire moderne. Le cyclone Chido, a laissé derrière son passage, samedi 14 décembre 2024, un paysage de désolation à Maore. Le dernier bilan dévoilé, ce lundi 23 décembre 2024 par Paris qui administre illégalement cette île, fait état plus de 35 morts et 2 500 blessés mais elle reconnait que le bilan pourrait bien s’alourdir dans les jours voire les semaines à venir. Il est sans doute évident que le gouvernement français cache l’ampleur du désastre causé par ses décennies de négligence à l’égard des infrastructures de Maore.
Une pensée aux victimes ainsi qu’à leurs proches.
Au-delà de cette grande épreuve, le débat autour du différend territorial sur Maore ressuscite les tensions entre les Comores et la France et ses partenaires. Ces derniers, comme le Maroc, n’hésitent pas à prendre position pour la France sur cette tension diplomatique entre Paris et Moroni.
Épisode 1 : Maroc, « pays frère » trahit les Comores sur la question de Maore comme très récemment les pays voisins Madagascar et Tanzanie !
Le dirigent du Maroc, Mohammed VI, a, en effet, adressé le dimanche 15 décembre dernier, un message de condoléances au président de la République française, Emmanuel Macron, à la suite du passage du cyclone Chido sur Maore.
Un geste anodin pour les partenaires de la France après le passage de Chido. Mais, cela ne devrait être plus le cas pour Moroni. En choisissant de s’adresser exclusivement à la France, ce geste ignore les revendications légitimes des Comores et indique une reconnaissance explicite de la souveraineté française sur île revendiquée par l’Union des Comores.
C’est un devoir en tant que citoyen comorien de rappeler que cette posture du Maroc n’est ni fraternelle ni amicale. Et elle est surtout en décalage avec les attentes des Comores et devrait fragiliser les relations diplomatiques entre les deux pays.
Ce geste est d’autant plus surprenant que les Comores ont été le premier pays à ouvrir un consulat à Laâyoune, dans le Saharaoui, le 18 décembre 2019, marquant un soutien explicite à la souveraineté marocaine sur ce territoire. D’aucuns ont vu d’un bon œil, comme l’ancien député et ministre des Affaires étrangères, M. Fahami Said Ibrahim, l’ouverture de ce consulat confié à Docteur Said Omar Said Hassane. Cet acte diplomatique a, en effet, acté la reconnaissance par les Comores de la souveraineté marocaine sur ce territoire Saharaoui contesté par le Front Polisario /République arabe sahraouie démocratique soutenu par Alger.
Les autorités, de fait, de Moroni ont préféré soutenir le Maroc considéré par la République arabe sahraouie démocratique comme entité occupante au lieu de soutenir ce pays occupé par une puissance étrangère comme l’est les Comores sur Maore.
L’Histoire a-t-elle donné raison à celles et ceux qui étaient contre la position pro-marocaine de Moroni sur le sujet Sahraoui ?
En revanche, l’on constate que le lendemain 16 décembre 2024, l’Algérie, pays frère des Comores et soutien de la République arabe sahraouie démocratique a exprimé sa solidarité envers les Comores à la suite du passage du cyclone Chido.
Dans une lettre officielle, l’ambassadrice d’Algérie à Addis-Abeba, Selma Malika Hadadi, a adressé ses condoléances au gouvernement comorien, qualifiant explicitement Maore d’« île comorienne ». Ce geste réaffirme le soutien constant de l’Algérie à l’intégrité territoriale des Comores et à leur lutte diplomatique pour la reconnaissance de leur souveraineté sur l’ensemble de l’archipel. Le Capitaine sankariste Ibrahim Traore, Président du Burkina Faso a fait le même geste en soutenant Moroni sur cette crise naturelle ayant secoué de plein fouet l’île comorienne de Maore.
Pourquoi le Raïs Mohamed VI adopte une posture ingrate envers Moroni ?
A-t-il omis que seul le Président comorien Ahmed Abdallah avait soutenu la position de son père Hassan II sur le Sahraoui, en 1982, lorsque le Maroc était désavoué par l’OUA, l’actuelle Union africaine ?
Les Comores ont toujours soutenu Maroc dans sa revendication sur le Saharaoui. D’ailleurs, le 15 novembre 2020, le Ministère comorien des Affaires étrangères et de la Coopération Internationale, était le premier à exprimer son soutien total au Royaume du Maroc dans ce « combat légitime et rend hommage à l’action héroïque des Forces Armées Royales. »[1]
Au nom du Chef de l’Etat, le Ministère de la diplomatie comorienne avait déclaré porter son soutien au Maroc sur le Saharaoui où les « Forces Armées Royales » faisaient face à l’obstruction de la circulation civile et commerciale au niveau de la frontière d’El Guergarat par les éléments de l’armée de résistance Polisario.
Doit-on lui rappeler que comme la revendication de Rabat sur Laâyoune, Moroni revendique aussi Maore qui fait partie intégrante de l’Union des Comores composée de 4 îles dont Maore (Mayotte), Mwali (Mohéli), Ngazidja (Grande-Comore) et Ndzuani (Anjouan).
Est-ce que le Maroc avait d’autres choix que de soutenir la France ? Savait-elle que l’indépendance comorienne demeure inachevée en raison de l’occupation de l’île comorienne de Maore par la France, ancienne puissance coloniale.
En réalité, Rabat a tout simplement soutenu Paris pour ses propres intérêts. Après, il faut l’admettre, les gouvernants comoriens, de fait, négligent de manière exagérée la question de l’île comorienne de Maore, depuis 1994 avec le retrait honteux de la question de Maore dans les débats des Assemblées Générales de l’ONU.
Mais là, trop c’est trop !
Le peuple comorien assiste sans force à la reconnaissance de Maore/Maore française par les pays voisins et frères.
Maroc vient compléter la triste liste longue des pays « frères » des Comores qui reconnaissent explicitement Maore française.
Le mécanisme se fait doucement, silencieusement et sûrement.
L’État comorien, par ricochet, le Ministère comorien des affaires étrangères, a failli à sa mission première, celle de veiller à la protection et la promotion des intérêts des Comores à l’étranger.
La question de Maore constitue la pierre angulaire de la diplomatie comorienne. L’île de Maore demeure une question d’intérêt général et capital des Comores depuis 1975 à ce jour.
Épisode 2 : Coopération entre Maore et Madagascar.
Le 1er juin 2022, une rencontre entre une délégation de Maore et de la province du Boeny à Madagascar avait conclu un accord pour l’importation de fourrage de la Grande île. Un nouveau pas dans le rapprochement entre Maore et Madagascar a été franchi le 25 juin, peut-on lire dans le Journal de Maore, avec la signature d’une convention de coopération entre Maore et 11 régions de Madagascar dont les régions Sofia, Vakinankaratra, Itasy.
Un communiqué de la Direction de la coopération économique de la présidence de la République de Madagascar a rendu compte de cet événement.
Madagascar « pays ami des Comores », reconnait officiellement Maore française en signant des accords de coopération directe avec cette île comorienne.
Aucune réaction du Ministère comorien des affaires étrangères dirigé à l’époque par M. Dhoihir Dhoulkamal sur ces accords qui sabotent l’intégrité territoriale des Comores.
Épisode 3 : Coopération entre Maore et Tanzanie.
Le 29 juin 2022, il y a eu une négociation à Maore d’un nouvel Accord de services aériens (ASA) avec la République unie de Tanzanie, pays ami des Comores. Les délégations mahoraise et tanzanienne ont négocié et trouvé un accord de coopération régionale.
Tanzanie, « pays ami des Comores », reconnait, aussi, de manière officielle Maore française en signant des accords de coopération directe avec cette île comorienne.
Aucune réaction du Ministère comorien des affaires étrangères de l’époque sur ces accords qui sapent, sans aucun, l’intégrité territoriale comorienne.
À la lumière des faits susmentionnés, en tant que citoyen comorien, on ne peut que lancer un appel à la démission de M. le ministre des Affaires étrangères des Comores, pour négligence avérée de la question de l’île comorienne de Maore.
C’est, enfin, un devoir solennel d’appeler le Gouvernement comorien, de fait, à convoquer les ambassadeurs de ces trois pays Maroc, Madagascar et Tanzanie pour avoir des explications sur cette violation de l’intégrité territoriale des Comores.
Dr. SAIF Youssouf Ahamada
Docteur en Sciences de l’Information et Communication à la Sorbonne.
ATER à la Sorbonne et ancien journaliste de l’ORTC et Africa 24.
Nos gouvernants sont d’incorrigibles stratèges en procédures entortillées dès qu’il est question d’organiser la moindre chose.
Il existe une mécanique de l’échec comorien. Cette mécanique, j’entends la dévoiler, pour qu’on puisse la dépasser, et retrouver les chemins de la prospérité. Commençons par mesurer l’ampleur du problème. Nos indicateurs économiques sont alarmistes depuis des années. La cruauté des chiffres est sans appel :
-En 2021, notre PIB était près de 9 fois inférieur à celui de l’île Maurice
-58% de nos emplois sont classés « vulnérables »
-Climat des affaires dans le monde en 2020 : Comores classées 160e pays sur 190.
-Indice de développement humain : Comores au 156e rang sur 191 pays
-Indice de corruption (échelle de 1 à 100) : moyenne mondiale 57 ; moyenne africaine 67, Comores 81.
– L’agriculture emploie plus de 70% de la population active, pour des rendements négligeables.
-Le chômage touche près de 50% des jeunes diplômés
Ces quelques chiffres décrivent la faillite de notre modèle de gouvernance, et l’impuissance de notre économie. Comment y remédier ? Les solutions courantes sont dans toutes les caboches : attirer les capitaux étrangers, solliciter les fonds d’aide internationaux, renégocier la dette, lutter contre la corruption endémique, … Que penser de cette litanie de bonnes intentions ? Au risque de paraître iconoclaste j’affirme que d’autres solutions doivent être préconisées pour obtenir un développement effectif sur le long terme. Nous pouvons par exemple faire la promotion d’un tourisme vert et respectueux de la nature. Le pays dispose exceptionnellement d’un patrimoine forestier et naturel apprécié par les touristes.
Le temps est venu de dépasser les discours volontaristes. Le lyrisme n’est plus de mise. Ce qu’il nous faut c’est de l’expertise, du diagnostic, et une libération des énergies entrepreneuriales pour fonder une véritable économie. Le développement des Comores sera atteint en plusieurs étapes.
Première urgence : rénover nos institutions féodales, afin de libérer les énergies créatrices, l’entrepreneuriat et la production de richesses. Vendons la mèche : trop de notables bien installés piétinent la grande tradition au profit de l’enrichissement personnel. Nous ne savons plus à quelle tradition nous fier, c’est pourquoi une vaste réflexion nationale doit être entreprise ces prochaines années pour séparer le bon grain de l’ivraie corruptrice. La vraie Tradition de nos aïeux se meurt chaque année davantage au profit de mille petites traditions vétilleuses qui empêchent la liberté d’action collective. Oui, la corruption a infiltré nos pratiques culturelles et elle nous gangrène de l’intérieur, ralentissant l’économie du long terme au profit d’une économie de l’immédiat. Nous assurons l’urgence en tuant l’avenir.
Soyons précis : en 2020, nos exportations constituaient 7,6% du PIB comorien, tandis que les importations atteignaient 29% du PIB. Nous reposons notre avenir sur une économie de rente, la fameuse trinité : Vanille, Ylang ylang, clous de girofle. Ces exportations assurent bien peu de prospérité, puisque c’est l’exportation de produits transformés qui génère la richesse économique. Mais ceci implique des industries, dans lesquelles notre Etat n’investit guère.
Comment moderniser nos îles sans écraser nos coutumes ? Comment enrichir nos concitoyens sans altérer notre identité ?
Notre principal atout, c’est notre solidarité culturelle, et les valeurs saines qui irriguent notre peuple. Mais nous savons que notre solidarité ne permet pas le développement : elle limite seulement les situations critiques. Nous devons donc miser sur une culture entrepreneuriale et commerciale plus volontaire si nous souhaitons engranger de la prospérité.
Une politique ambitieuse de transports publics, maritimes, terrestres et aériens permettra d’accroître les flux de richesses et de personnes entre nos territoires, dont le nouveau dynamisme offrira en retour une explosion des recettes fiscales : « le grand chantier de demain pour le comorien, c’est l’avènement d’une circulation nouvelle express qui lui permettrait de travailler dans une île la journée et de rentrer le soir chez lui dans une autre île sans qu’il ait perdu des heures et tout son salaire ».
Nous sommes à la veille d’une ère nouvelle. Il ne tient qu’à nous de saisir l’opportunité du développement, qui commence par une saine auto-critique de nos usages, et un refus implacable de toute corruption. Il faut laisser l’économie se développer, exiger des administrations qu’elles accompagnent plutôt qu’elles ne freinent les projets de la jeunesse. L’économie informelle est un jeu à somme nulle qui ne crée aucune plus-value pour le pays. Augmenter la productivité du pays passe par l’augmentation des flux de personnes et de capitaux.
Nassur Oumouri
Vice-Président du fonds du développement des Comores
Auteur du livre « les conditions du développement des Comores »
Du 4 au 6 septembre, le Sommet 2024 du Forum sur la coopération sino-africaine (FOCAC) se tiendra àBeijing sur le thème « S’associer pour promouvoir la modernisation et construire une communauté d’avenir partagé Chine-Afrique de haut niveau ». Le président chinois, Xi Jinping, a rencontré lundi le président des Comores, Azali Assoumani, qui se trouve à Beijing pour participer au Sommet du FOCAC. Les deux dirigeants ont annoncé l’élévation des relations bilatérales au niveau d’un partenariat stratégique.
La Chine a été le premier pays à reconnaître l’indépendance des Comores et à établir des relations diplomatiques avec les Comores. Les deux pays sont de bons amis, de bons partenaires et de bons frères, dotés de la sincérité, l’amitié et la confiance mutuelle. Ces dernières années, les relations bilatérales se développent rapidement. Les deux pays se soutiennent fermement et mutuellement sur des questions liées à leurs intérêts vitaux et à leurs préoccupations majeures, entretenant une coopération pragmatique fructueuse dans divers domaines, ce qui fait de la relation sino-comorienne un exemple de relations entre pays de tailles différentes caractérisées par l’égalité, la solidarité et la coopération.
Confiance politique mutuelle approfondie
La Chine respecte la souveraineté, l’indépendance et les traditions nationales des Comores, entend combiner l’Initiative de la Ceinture et la Route avec le Plan Comores Emergents à l’horizon 2030 et fournir une assistance, dans la mesure de ses capacités, au développement indépendant et durable des Comores. Les Comores adhèrent fermement au principe d’une seule Chine et soutiennent la Chine sur la scène internationale. Sous le pilotage stratégique du Président Xi Jinping et du Président Azali Assoumani, les échanges et la coopération entre les deux pays se développent et s’approfondissent dans divers domaines, surtout dans le cadre du FOCAC et du Forum sur la coopération sino-arabe.
Coopération pragmatique fructueuse
Les coopérations pragmatiques entre les deux pays dans les domaines des infrastructures, du développement agricole, de la santé et d’autres domaines jouent un rôle important dans la promotion du développement socio-économique et de l’amélioration de la vie de peuple. En août 2023, le Président Xi Jinping a avancé, lors du Dialogue des dirigeants Chine-Afrique, l’Initiative pour le soutien à l’industrialisation de l’Afrique, le Programme d’assistance à la modernisation de l’agriculture de l’Afrique et le Plan de coopération sino-africaine pour le développement des talents, pour aider à accélérer l’intégration et la modernisation de l’Afrique. L’Initiative pour le développement mondial proposée par la Chine a ouvert de nouvelles perspectives de coopération sino-comorienne dans divers domaines, tels que infrastrutures, économie bleue, économie numérique, énergie, agriculture, santé, éducation professionnelle, etc. Par exempel, en juin dernier, la route nationale de l’île de Mohéli financé et construite par la Chine a été inaugurée et hautement appréciée. L’équipe médicale chinoise et l’assistance techinique chinoise antipaludique contribuent au développement de la cause sanitaire des Comores. Chaque année, près de 200 talents techniques comoriens bénéficient de formation en Chine pour apprendre la technologie et l’expérience de gestion de la Chine.
Echanges de personnel actifs
Les échanges de personnel actifs entre les deux pays dans les domaines de l’éducation, de la culture et du sport ont favorisé la compréhension mutuelle entre les deux pays et renforcé la base de l’amitié sino-comorienne. L’Institut Confucius de l’Université des Comores contribue activement à l’enseignement du chinois et la promotion de la culture chinoise. Chaque année, des dizaines d’étudiants comoriens partent étudier en Chine. De nombreux jeunes Comoriens s’intéressent à la culture et à la langue chinoises et à découvrir la Chine. Beaucoup me saluent chaleureusement en chinois sur la rue. La série télévisée chinoise Minning Town diffusée à la télévision nationale a connu un succès aux Comores. Récemment, à l’occasion des Jeux olympiques, la partie comorienne a exprimé la volonté d’échanger avec la Chine dans le domaine du sport.
Adhérant aux principes de « sincérité, résultats effectifs, amitié et bonne foi », la Chine aide les pays africains, y compris les Comores, dans leur développement socio-économique, ce qui montre la responsabilité mondiale du Parti communiste chinois (PCC). En juillet dernier, le 3e plénum du XXe Comité central du PCC a décidé d’approfondir la réforme d’une manière plus poussée sur tous les plans en vue de promouvoir la modernisation chinoise. Les perspectives de développement prometteuses de la Chine apporteront davantage d’opportunités de développement aux pays africains.
GUO Zhijun
Ambassadeur Extraordinaire et Plénipotentiaire de la
République Populaire de Chine en Union des Comores
Les candidatures à l’élection présidentielle de l’Union des Comores doivent être déposées entre le 7 et le 17 novembre prochains. Et si l’on croit bien aux intentions des uns et des autres du côté de l’opposition, la bataille s’annonce rude. A condition que l’élection soit bien sécurisée.
Analyse. « Le prochain président sera encore Azali, vous devez le savoir », assure un très proche du couple Azali, officiant aussi dans un cabinet ministériel. « Il n’y aura pas de surprise », renchérit un jeune ex-prisonnier du régime Azali, se trouvant actuellement à l’extérieur. C’est un sentiment partagé par beaucoup de Comoriens persuadés que les autorités sortantes disposent de toutes les forces militaires et financières pour conserver le pouvoir.
Au sein du gouvernement, on pense la même chose. Ses membres se projettent pour une victoire écrasante dès le premier tour comme en 2019. Un ministre confiait récemment à ses interlocuteurs que « la CRC pourrait diriger le pays jusqu’en 2034 ». C’est d’ailleurs cette peur qui a conduit plusieurs membres de l’opposition à renoncer à cette élection sans avoir vraiment un autre moyen de se débarrasser d’Azali qu’ils qualifient de « dictateur usurpateur du pouvoir ».
Mais, ce fatalisme n’a pas fait sombrer tout le monde. Des partis politiques forts, des personnalités de grande envergure voient l’avenir autrement. Pour eux, il y a une petite lumière à l’horizon qu’il faut aller amplifier. Et ils se basent d’abord sur le bilan catastrophique du régime depuis 2016, puis sur la volonté du peuple comorien d’en finir avec Azali, et surtout sur la volonté de la communauté internationale d’aider le pays à se remettre la tête à l’endroit.
Le discours tenu depuis quelques semaines par l’ancien gouverneur de Ngazidja Mouigni Baraka Said Soilihi, l’intronisation d’un candidat par le Juwa, principale formation politique de l’opposition comorienne, et la détermination des différentes coalitions, illustrent parfaitement cette volonté d’aller à l’affrontement politique et faire échouer les plans du régime Azali. Et le mouvement commence à galvaniser les foules parmi les électeurs.
« Azali n’est pas capable aujourd’hui de gagner une élection. Son mauvais bilan et le rejet de sa personnalité au niveau du pays le disqualifient automatiquement», croit-on au niveau de l’opposition qui se dit prête à aller au combat et de défendre ses résultats.
Voilà pourquoi, celle-ci exige que l’armée ne soit pas mêlée dans le processus électoral au-delà de son rôle de maintien de l’ordre. « Cette fois, nous n’allons pas fuir nos responsabilités. Nous serons dans les bureaux de vote, nos militants y seront avec engagement. L’objectif pour nous est d’être sûr que les résultats sortis des urnes sont à notre faveur. A partir de là, on se battra », prévient Mouigni Baraka Said Soilihi.
On entend le même son de cloche au sein du parti Juwa qui mobilise ses équipes et ses militants dans les trois îles contre les éventuelles fraudes électorales. D’autres mouvements politiques conduits par des jeunes leaders : Ulezi, Badili, Huri…, font le même constat et se préparent, eux aussi, pour ne laisser aucune chance à la mascarade annoncée.
Il reste à savoir comment procéder si le régime en place continue de verrouiller les institutions électorales et nommer ses hommes aux postes clés. « La communauté internationale va se baser sur les résultats issus des urnes. Si on gagne, elle va nous accompagner pour que le gagnant dirige le pays », assure l’ancien gouverneur et candidat malheureux aux élections de 2016 et 2019.
Mais pour y parvenir, tout le monde doit agir : les électeurs, les fonctionnaires, les partis politiques, les groupes de citoyens, les professionnels de la sécurité et les journalistes, même les juges. Ce n’est que collectivement que l’on peut faire respecter les normes et exiger qu’il y ait une élection démocratique, libre et transparente dans notre pays.
La première chose que l’on remarque en descendant sur l’aéroport de Moroni aux Comores est le magnifique océan. La beauté des plages grises est intense – mais aussi refroidie par la lave et les restes de voitures d’occasion. De l’aéroport, nous sommes partis visiter une initiative gouvernementale soutenue par le PNUD sur l’agriculture. En route , on voit des groupes de femmes attendre pour aller chercher de l’eau avec leurs jerrycans. On constate également une forte présence de déchets plastiques.
Mais ensuite, nous arrivons au Centre Rural de Développement Économique (CRDE ) à Diboini, – et observons comment les défis que nous venons d’observer se transforment en opportunités – et comment cela, apportent un changement transformateur pour les gens.
Le projet « Renforcement de la résilience des Comores aux risques de catastrophes liées au changement et à la variabilité climatique » financé par le Fonds Mondial pour l’Environnement (FEM) a déployé une station météorologique automatique qui a renforcé la collecte de données et amélioré les prévisions climatiques. Ces données, essentielles à l’adaptation au changement climatique, sont transmises à la Direction Technique de la Météorologie, où des techniciens formés par le projet analysent et émettent des prévisions vers quatre autres stations installées sur d’autres parties de l’île. En bref – grâce à cet investissement, les communautés majoritairement des femmes sont mieux placées pour synchroniser leurs activités agricoles, et peuvent donc espérer de meilleurs rendements, malgré la pression du changement climatique.
Dans le même CRDE, un projet financé par le Green Climate Fund (GCF) a mis en place des réservoirs de collecte d’eau fournissant aux agriculteurs l’irrigation, ce qui a augmenté leur production et doublé leurs revenus. L’objectif global du projet, qui est d’étendre l’accès à l’eau potable de ses 15 % actuels à 60 % des 450 000 habitants de l’île, est un exemple classique de la façon dont les ressources de développement peuvent être ciblées pour apporter des changements transformationnels critiques, à grande échelle.
Pour augmenter la productivité agricole, promouvoir la sécurité alimentaire et garantir des revenus plus lucratifs aux agriculteurs, le PNUD a aidé le gouvernement à développer des variétés améliorées de banane, de manioc, de patate douce et de gingembre ; para vétérinaires formés, amélioration de la disponibilité des médicaments vétérinaires dispensés et pratiques d’élevage. Tous ces efforts ont abouti à la production de races améliorées de vaches laitières, modifiant radicalement les enjeux au profit des populations.
Dans toutes ces interventions, ce qui a été la clé du changement transformateur a été le choix stratégique du gouvernement et de l’équipe des Comores du PNUD de mettre les communautés au centre de l’attention, afin que leur agence soit sécurisée ; et de chevaucher chaque projet géographiquement en tirant parti des activités des autres, et en apportant ainsi un changement percutant à 360 degrés.
L’objectif est clair : renforcer la résilience et intensifier l’impact.
Dans une île où environ 80% de la population rurale dépend de l’agriculture pluviale pour sa subsistance, ce secteur doit être le fondement pour catalyser le développement. Et avec les fondations réussies de l’adaptation au changement climatique posées, il est maintenant temps d’approfondir les investissements dans le renforcement de la résilience. C’est aussi le moment de passer à l’échelle. L’intégration de solutions inter-portefeuilles est essentielle à la mise à l’échelle, par exemple en incorporant la production d’énergie durable à des approvisionnements en eau améliorés ; assurer l’accès au marché pour que les agriculteurs réalisent des bénéfices grâce à leur production accrue et offrir des opportunités de valeur ajoutée, notamment grâce à des investissements dans l’amélioration des infrastructures (comme les routes et la chaîne du froid).
Investir dans la valeur ajoutée des matières premières agricoles des Comores doit être la prochaine étape vers la modernisation et l’industrialisation. En collaboration avec le gouvernement et les banques de développement, le PNUD Comores travaille déjà pour offrir des prêts concessionnels permettant aux petites et moyennes entreprises de créer des produits à valeur ajoutée. Mais ce n’est pas assez. Nous devons travailler avec les communautés pour attirer plus d’investissements, attirer plus de partenaires et étendre ces bonnes leçons non seulement aux Comores, mais aussi dans d’autres pays de la région, pour élargir le panier du changement transformateur.
Les petits États insulaires en développement comme les Comores ouvrent la voie en Afrique.
Avec les Comores assumant la présidence de l’Union africaine en 2023, il y a une occasion unique de faire exactement cela : mettre ces expériences à profit à l’échelle continentale. À bien des égards, les défis et les opportunités que nous avons vus aux Comores reflètent ceux d’autres régions d’Afrique. À l’instar des Comores, mettre l’Afrique sur la bonne voie pour atteindre les ODD nécessite des investissements à grande échelle pour réaliser une transformation économique structurelle, renforcer la résilience à long terme aux chocs actuels et futurs, réduire la dépendance de l’Afrique (en particulier vis-à-vis de la nourriture et du carburant) et augmenter sa capacité de production. Le renforcement de la résilience des systèmes alimentaires africains est essentiel pour la sécurité alimentaire et stimulera la productivité agricole du continent, tout en établissant une base solide pour l’industrialisation basée sur l’agro. Il permettra à l’Afrique de rentabiliser ses atouts en tant que région abritant 60% des terres arables inexploitées du monde.
Alors que l’Union africaine consacre 2023 comme l’année pour accélérer la mise en œuvre de la Zone de la Libre Echange Africaine (Zlecaf), les pays africains ont une opportunité unique de se positionner pour améliorer leurs exportations sur un marché de 1,4 milliard de personnes et un PIB combiné de 3,4 billions de dollars. Un marché unique en Afrique doté de la libre circulation des biens, des services et des personnes modifie radicalement la trajectoire de développement du continent d’une manière extrêmement positive – avec la perspective de sortir 30 millions de personnes de l’extrême pauvreté et 69 autres de la pauvreté modérée, augmentant ainsi les revenus de 450 milliards de dollars d’ici 2035 et stimuler le commerce intra-africain de 33 %.
Cela peut être un marché pour les Comores… et pour les autres États membres de l’Union africaine – si les bons investissements sont faits.
Nous avons quitté les Comores avec l’espoir : que l’approche Diboini, si elle est mise à l’échelle, offre à ces belles îles une nouvelle possibilité de développement : celle qui est ancrée sur l’agence – autonomiser les communautés et maximiser la valeur de leurs actifs pour lutter contre la pauvreté, créer de la richesse – et repousser sur les rigueurs de l’urgence climatique.
Nous sommes également partis avec la certitude que cette nouvelle approche peut sauter directement des îles de la lune à l’Afrique et, en fait, au reste du monde.
NOURA HAMLADJI : Directrice Régionale Adjointe, Bureau régional pour l’Afrique
RIAD MEDDEB : Conseiller principal pour les PEID
PRADEEP KURUKULASURIYA : Directeur et Coordonnateur exécutif, Nature, climat et énergie, PNUD
Alors que le chef de l’Etat n’a toujours pas gracié les prisonniers politiques pour un climat d’apaisement, le citoyen comorien mis à l’écart, l’idée de vouloir instaurer un « dialogue national » afin de mettre un terme au conflit est loin d’être un canal des solutions. Les comoriens sont « entre doute et sincérité » dans la mesure où les vraies bases d’un dialogue franc et inclusif reposent sur le rapprochement de toutes les parties prenantes : opposition, gouvernement et société civile pour un objectif bien défini. Commentaire.
La tentative du président Azali Assoumani d’instaurer un dialogue national aux Comores est-elle une chance de mettre fin au conflit né au lendemain des élections anticipées de 2019 ? Une problématique qui reste jusqu’alors sans réponse. La crise post-électorale a déraillé le pays sur la voie de la démocratie et a basculé sur une autre forme plus dangereuse : liberté d’expression muselée et mesure drastique contre toute manifestation même pacifique. Plus d’une trentaine de prisonniers politiques, parmi lesquels figurent des anciens chefs d’Etat, des cadres de l’opposition et des citoyens lambda périssent dans les geôles du grand maître pendant que d’autres sont en résidence surveillée. Un grand nombre des politiciens se trouvent en exil. Les pro-dialogues nationaux ignorent peut-être ce constat. En ce rendez-vous encore historique, le citoyen comorien voit son implication oubliée pendant que son rôle en tant que médiateur indépendant est primordial. Et les débats s’intensifient, entre ceux qui sont confiants pour ce grand rendez-vous et les citoyens qui restent méfiants.
Le dialogue devait dégager des pistes de solution sur la vie sociopolitique du pays et son destin. Le citoyen lambda, victime de la politique politicienne, reste vigilant. Il connaît déjà la mélodie et la danse. Il n’est pas bête au point qu’il ne se souvient toujours pas des derniers évènements, notamment la conférence des bailleurs de fonds à Paris qui n’a rien donnée comme résultat et les assises nationales traduites à un coup d’épée dans l’eau. La société civile est consciente des enjeux et compte établir ses préalables mais le président de la République règne en maître, lui-même les a déjà fixées : prochaines échéances électorales de 2024 sans tenir compte de la vie des comoriens de tous les jours. Dans une analyse un peu croisée, le président de la République n’a pas le droit à l’erreur. Il devait avoir une oreille attentive sur toutes les parties prenantes pour éviter le fiasco.
La vie quotidienne de chaque comorien grimpe tous les jours : jeunes diplômés sans emploi se jettent dans les mers de Mayotte et la méditerranéenne pour espérer une vie meilleure, hausse des prix des denrées alimentaires, hausse des tarifs douaniers pour toutes marchandises importées et hausse des prix de data. Ce qui signifie que ce dialogue devait jeter les bases solides d’une politique stable afin de dégager des vraies pistes de solution.
L’opposition et la société civile absentes pendant que le pouvoir rassure en effet que « seule la volonté affirmée des uns et des autres permettra de sortir le pays de cette situation ». Le paradoxe, une chanson que bon nombre des comoriens l’ont déjà entendue dans les assises nationales puis dans les grands meetings du pouvoir en mars 2019. Le pouvoir continue à faire rêver et plonger les comoriens dans l’utopie : l’émergence. Sachant que les pays émergents comme le Rwanda de Paul Kagamé, le premier combat mené est de faire table rase, réconcilier la classe politique Rwandaise déchirée par la guerre civile de 1994 et mettre à terme les conflits entre les tribus. Dans notre analyse, les conditions propices pour un dialogue national ne sont pas réunies. Le climat politique et social n’augure rien « de l’esprit inclusif, encore moins sincère concernant ce dialogue », car il y a bien un côté sombre de cette messe nationale dont le citoyen comorien est « entre doute et sincérité ».
Pour une société en perdition, une nation fracturée et un Etat gangrené, notamment par la corruption, le dialogue est sans aucun doute le moyen le plus efficace pour tenter de retrouver le bon chemin et se réconcilier. Seul le dialogue permet de faire le bon constat, de souligner les travers et de proposer des perspectives.
Toute personne dotée de raison connait les vertus d’un dialogue et ne peut qu’inciter et se réjouir de sa tenue. Plus particulièrement dans un pays ravagé par la pauvreté, où les valeurs de cohésion sociale de justice égalitaire sont abandonnées voire foulées aux pieds, et dont les dirigeants ont démontré depuis près de cinq décennies leur incapacité à gouverner de façon harmonieuse et à répondre aux attentes de la population. C’est bien le cas des Comores. Et l’appel au dialogue prôné par le gouvernement, trois ans à peine après les assises, illustre parfaitement la sévérité et l’incongruité de la situation.
Oui en Union des Comores, rien ne va. Le peuple est moralement atteint. Et personne ne croit sérieusement en des lendemains qui chantent. La jeunesse désespérée perd les repères et s’engage sur une pente dangereuse. Le chômage explose, la pauvreté s’accroit, la violence prend un visage jusque-là inconnu, les injustices s’accumulent et les fonctionnaires n’en peuvent plus à cause des salaires trop bas, souvent versés dans la douleur et de l’inflation galopante.
Ce dialogue annoncé fin février est une sorte d’autoflagellation pour un gouvernement et un président qui ont toujours fait l’apologie du chaos en niant l’existence du moindre problème dans le pays. De leur petit monde arrogant et suffisant, de l’antichambre où les visiteurs-courtisans font les éloges habituels de la politique du vide, ils ne se rendent pas compte des drames régulièrement vécus par le peuple, ce peuple si loin de leurs préoccupations.
Mais comme le dit si bien le vieil adage : mieux vaut-tard que jamais. Ce dialogue pourrait avoir le mérite de tout réparer, de réconcilier nos populations et refaire de nous une vraie nation.
A condition que ce dialogue soit un moment de sincérité, plutôt qu’un nouveau cirque destiné à amuser la galerie et à faire croire que la méchanceté demeure une spécialité de l’autre camp.
Cette sincérité doit être perceptible dans la capacité du gouvernement à écouter l’opposition et la société civile jusqu’à parvenir à des compromis acceptables dans l’intérêt supérieur de la nation. Mais continuer à chanter le même refrain d’une vieille musique en criant que les autres chantent faux : qu’ils ont toujours tort ou qu’ils sont de mauvais perdants est synonyme d’échec prévisible. Un dialogue sous forme d’un débat entre soi aboutira aux mêmes résultats que ceux des assises de 2018 véritables jeux de cirque dont les clowns de service n’amusaient que les metteurs en scène et dont le bilan est catastrophique pour les institutions, et surtout pour les citoyens qui en paient un lourd tribut.
Voilà pourquoi je ne suis pas d’accord avec mon confrère Ahmed Ali Amir quand il charge, dans le journal La Gazette, l’opposition pour son refus de participer à ce dialogue. Il l’accuse d’avoir « fait un aveu d’échec » tout en prétendant faussement que c’est la première fois dans l’histoire qu’une opposition refuse de dialoguer avec un gouvernement en qui, elle n’a plus confiance.
Quant au coordinateur national du dialogue, il m’a sidéré lorsque lors de son premier entretien avec le journal Al-Watwan, fin novembre après sa nomination, il considère comme illégitimes les préalables de l’opposition, notamment la libération des prisonniers politiques. Selon lui, « les problèmes politiques que le pays vit en ce moment peuvent être posés au sein même du dialogue. Ceux qui doivent prendre part au dialogue ont sans doute des préoccupations qui leurs sont particulières et ils ont intérêt à prendre part au dialogue pour poser leurs problèmes au lieu de faire la politique de la chaise vide».
Toutes ces déclarations cautionnées par le gouvernement ne contribuent pas à l’apaisement. Au contraire, elles amplifient la méfiance et renforcent le sentiment général qu’il s’agit d’une opération à desseins multiples autres que la réconciliation du pays.
Mais il n’est jamais trop tard pour mieux faire. Il reste encore quelques semaines pour essayer de raccorder les violons et mettre tout le pays sur le même diapason. Retrouvons la foi vers laquelle notre nation s’est toujours attachée. S’il faut tout changer, et vite, alors il ne faut pas hésiter, si c’est pour le bien du peuple comorien. Par exemple : libérer les prisonniers politiques pour ouvrir cette voie de la confiance, ne serait que réparer une injustice qui n’a que trop duré ; reconnaitre que la réforme constitutionnelle de 2018 n’a pas respecté les règles des institutions et qu’elle les a rendues encore plus fragiles ne saurait être une abdication, mais plutôt une marque de respect vis-à-vis de ces mêmes institutions et du peuple qu’elles sont censées être à son service.
Je comprends que pour une grande partie de nos compatriotes le désespoir est si profond, qu’elle refuse de croire à des lendemains radieux. Mais, je reste persuadé qu’une petite lumière peut émerger à tout moment pour illuminer les cœurs de nos dirigeants et apporter de l’espérance dans la communauté nationale. Il suffit d’y croire et d’agir avec courage et sincérité.
« En Politique, ce qui arrive souvent, c’est l’imprévisible. » Jean D’ORMESSON de l’Académie française (1925- 2017).
D’ici quatre ans, notre pays, l’Union des Comores fêtera ses 50 ans d’Indépendance. Pour cela, rappelons d’abord quelques événements historiques : 6 juillet 1975, 3 Août 1975, 13 Mai 1978, 26 Novembre 1989, 27 Septembre 1995, 3 Août 1998, 6 novembre 1998, 30 Avril 1999… ne vont pas sans la tentation, sans la tentative de changer l’homme comorien.
Révolutionnaires conquérants de l’inutile, qui participent à l’espoir de changer la société comorienne pour un lendemain meilleur ou à l’espoir de changer l’ordre social, l’ordre colonial établit par les Blancs pendant plus d’un siècle et demi de colonisation : transformer les conditions d’existence pour déterminer et instaurer une autre conscience : celle qui effacera le pouvoir des colons et qui mettra désormais en place un « homme nouveau ».
N’est-ce pas une tâche impossible ? Mais c’est rêver de justice, rêver d’aboutir à une égalité entre hommes et femmes comoriens (Président ALI Soilihe) ; égalité des citoyens désaliénés, non exploités, à égalité de chances, parce que libérés du système colonial et instaurer une nouvelle voie, celle qui mène vers un monde nouveau, dans un Etat démocratique, qui ressemblerait à celui des révolutionnaires français, ayant pour devise : « liberté, égalité, fraternité » (Selon le souhait du feu Président Saïd Mohamed Djohar et sa fameuse démocratie).
Vous croyez rêver, diront les autres ! la fraternité, entre colon/colonisé, entre Bourgeois/paysan, entre riche et pauvre n’existe nulle part au monde surtout pas aux Comores. Pourquoi ? Parce que le monde est fratricide. L’histoire, notre histoire est faite de bruit et de fureur, de sang, de sueur, de peines et de larmes ; en un mot, notre histoire du moins celle de ces cinquante dernières années d’indépendance, est marquée par la violence. Violence entre le bras de mer qui sépare Anjouan et Mayotte (trop de morts), violence en tous lieux, de tous temps avec les mercenaires français dont Bob Denard en tête. Cette violence est inhérente à la vie politique de cet Etat/Nation depuis juillet 1975. Plusieurs de nos chefs d’Etats ont été sauvagement abattus par le système colonial Français. Cette violence rythme la vie des hommes politiques comoriens : le monde Politique comorien est constitué d’une part, par les victimes (nationaux) et d’autre part les bourreaux et leurs complices (Anciens colons et mercenaires Français).
Quant à la classe politique d’une manière générale, car elle aussi, elle a sa part de responsabilité dans cette violence aveugle, les leaders de ladite classe s’accusent mutuellement et chaque camp désigne l’autre comme l’enfer. Comme disait Jean Paul Sartre, l’enfer c’est les autres.
Aux yeux de l’Ancien Président Ahmed ABDALLAH ABDEREMANE (Dieu ait son âme), l’enfer ce n’était pas le colon Français, ni le Mercenaire Bob Denard mondialement connu. C’était plutôt ALI Soilih car il a osé ouvrir une nouvelle page de l’histoire des Comores indépendantes pour prendre part à une révolution, en croyant faire l’histoire sans savoir l’histoire qui est faite.
Une participation solidaire à des entreprises libératrices, à la construction d’une issue qui, comme l’horizon, recule au fur et à mesure qu’on avance.
Bientôt 50 ans d’Indépendance, pourtant on a l’Impression que c’est aujourd’hui que ça commence…
C’est pourquoi- je me demande et j’estime que je ne suis pas le seul ; qu’après la prise de l’indépendance, la liberté et l’égalité rêvées, la participation aux luttes afin qu’elles adviennent, qu’elles nous ouvrent la voie d’un lendemain meilleur, n’était-ce pas une grande illusion ?
Après 50 ans d’indépendance, le moment n’est-il pas venu de prendre conscience que toute action est liberticide et inégalitaire certes, mais en même temps que toute action n’est pas vaine ?
Chacun de nous n’a-t-il pas le devoir de faire énergiquement, sa longue et lourde tâche, car tout travail est un trésor, participer à rétablir la grandeur de cet Etat/Nation et puis mourir…
J’insiste, il ne s’agit plus de rêver d’ailleurs et de demain, mais de participer ici et maintenant pour redonner l’espoir au peuple comorien, sans être au service d’un absolu, ou en quête d’un absolu, engendrant l’Impossible, mais de changer le quotidien du commun des mortels.
Il s’agit de lutter dans la mesure de nos moyens contre la maladie, la misère, la pauvreté, contre la dictature et la corruption. Il s’agit de ne pas oublier le présent pour l’avenir. Certes je sais bien que la vraie générosité envers l’avenir c’est de tout donner au présent.
2025, c’est presque demain, pour réussir ce pari, il nous faudra regarder à plusieurs dans la même direction. C’est aussi le sens des combats auxquels il faut participer en vue de la liberté et de l’égalité, du respect de la loi, de la démocratie et du droit de l’homme.