Une poupée « Moina wa Mvanguati » est une statue en bois, façonnée et habillée en tenue traditionnelle de mariage dans l’île d’Anjouan. Encore un savoir-faire qui se perd dans nos îles. Une poupée qui montrait la beauté de la femme et de la culture du pays.

Aujourd’hui, rares sont les personnes avec ce savoir-faire. La légende raconte que la poupée était mariée avec des humains avec toutes les cérémonies possibles. Nous sommes allés rencontrer une des dernières femmes de Ndzuani qui préserve ce savoir-faire. C’est Farid Rachad, directeur de la culture qui nous donne le contact de cette légende qui accepte sans condition de nous ouvrir les portes de son domicile. Pour y aller, vous prenez le bus pour la grande cité millénaire, la ville de Domoni. Hachim Mohamed Ali, un historien nous apprend que « il y avait des familles spéciales qui faisaient ça. Aujourd’hui, il n’y a plus de trace. C’est regrettable ».
« Il y a longtemps, on mariait la poupée avec des humains. C’était un jeu pour les jeunes. Toutes les activités de mariage étaient faites. On faisait tout comme les humains », dit-il. Selon lui, cette histoire lui est racontée par sa mère qui, « elle aussi confectionnait les poupées ». C’est l’arbre qui s’appelle « Mvanguati ». On ne retrouverait le bois que dans la ville de Sima. « On le retrouvait à Domoni, mais plus maintenant. C’est un bon bois qui ne se décompose pas. Ceux qui le faisaient ne le font plus. Ma mère est morte », nous raconte Touhoufat Abdallah Allaoui, une sexagénaire et la seule de la famille à avoir appris la fabrication de la poupée. Elle explique que « quand, je suis devenue handicapée alors de passage en passage de la classe de 3e. J’ai alors appris à travailler de mes mains. Je faisais les poupées et les autres. À l’époque, c’était juste des femmes, mais j’ai innové. J’ai confectionné et fabriqué des poupées d’hommes. À la base, c’est du bois, du Shiromani et un savoir-faire. Le prix de ces poupées est évalué à la taille entre 25.000 et 100.000 de nos francs. Je les vends aux étrangers. Eux, ont souvent un bon cœur en me voyant », explique-t-elle. Interrogée sur le partage de savoir-faire, elle regrette que « j’ai voulu enseigner à des personnes. La plupart m’ont manqué de respect. Je suis réticente. Les gens ne savent pas en faire et ne s’intéressent pas ».
Elle-même confie que « j’ai organisé toutes les foires avec ma santé. Il y a pas mal d’années maintenant, une de mes poupées est volée. C’est une triste histoire pour une personne comme moi. Nous avons fait une formation dans la belle ville d’Itsandra. J’avais laissé cette poupée. Plus tard, dans une exposition, le directeur de l’Alliance Française m’a appris qu’une poupée pareille était championne du monde dans un concours à l’île de la Réunion. Un directeur de l’artisanat de l’époque a caché cette histoire et la poupée. Le directeur de l’Alliance française m’a avoué que j’avais été première à ce concours. Je lui avouais que je n’étais pas au courant de rien. Je suis handicapée et ce directeur, à l’époque anjouanais a vendu toute sa fierté », regrette-t-elle.
Sa sœur à côté a fait savoir que Touhoufat Abdallah Allaoui, est bourrée de talent. « Elle sait faire du Msindzanou, du Guena, et autres. Elle connaît tous les noms des épices, des ustensiles », nous confie sa sœur. De sa part, la directrice de l’artisanat, Anrifia Ali semble touchée. « Après un recensement des confectionneurs, nous n’avons trouvé que deux qui font ces poupées, à savoir Chakri de Mutsamudu et Touhoufat Abdallah Allaoui de Domoni. Et ils sont tous vieux », dit-elle et précise que « cette poupée représente notre culture, notre identité. Ça peut être un facteur de développement économique ». Tout Domoni, quand on parle de cette poupée, on parle de Touhoufat Abdallah Allaoui connue sous le nom de Thamaroiti. Son nom est connu de partout, mais ignoré par les plus jeunes.
Ahmed Zaidou








