L’Archipel des Comores traverse la plus grave catastrophe naturelle de son Histoire moderne. Le cyclone Chido, a laissé derrière son passage, samedi 14 décembre 2024, un paysage de désolation à Maore. Le dernier bilan dévoilé, ce lundi 23 décembre 2024 par Paris qui administre illégalement cette île, fait état plus de 35 morts et 2 500 blessés mais elle reconnait que le bilan pourrait bien s’alourdir dans les jours voire les semaines à venir. Il est sans doute évident que le gouvernement français cache l’ampleur du désastre causé par ses décennies de négligence à l’égard des infrastructures de Maore.
Une pensée aux victimes ainsi qu’à leurs proches.
Au-delà de cette grande épreuve, le débat autour du différend territorial sur Maore ressuscite les tensions entre les Comores et la France et ses partenaires. Ces derniers, comme le Maroc, n’hésitent pas à prendre position pour la France sur cette tension diplomatique entre Paris et Moroni.
Épisode 1 : Maroc, « pays frère » trahit les Comores sur la question de Maore comme très récemment les pays voisins Madagascar et Tanzanie !
Le dirigent du Maroc, Mohammed VI, a, en effet, adressé le dimanche 15 décembre dernier, un message de condoléances au président de la République française, Emmanuel Macron, à la suite du passage du cyclone Chido sur Maore.
Un geste anodin pour les partenaires de la France après le passage de Chido. Mais, cela ne devrait être plus le cas pour Moroni. En choisissant de s’adresser exclusivement à la France, ce geste ignore les revendications légitimes des Comores et indique une reconnaissance explicite de la souveraineté française sur île revendiquée par l’Union des Comores.
C’est un devoir en tant que citoyen comorien de rappeler que cette posture du Maroc n’est ni fraternelle ni amicale. Et elle est surtout en décalage avec les attentes des Comores et devrait fragiliser les relations diplomatiques entre les deux pays.
Ce geste est d’autant plus surprenant que les Comores ont été le premier pays à ouvrir un consulat à Laâyoune, dans le Saharaoui, le 18 décembre 2019, marquant un soutien explicite à la souveraineté marocaine sur ce territoire. D’aucuns ont vu d’un bon œil, comme l’ancien député et ministre des Affaires étrangères, M. Fahami Said Ibrahim, l’ouverture de ce consulat confié à Docteur Said Omar Said Hassane. Cet acte diplomatique a, en effet, acté la reconnaissance par les Comores de la souveraineté marocaine sur ce territoire Saharaoui contesté par le Front Polisario /République arabe sahraouie démocratique soutenu par Alger.
Les autorités, de fait, de Moroni ont préféré soutenir le Maroc considéré par la République arabe sahraouie démocratique comme entité occupante au lieu de soutenir ce pays occupé par une puissance étrangère comme l’est les Comores sur Maore.
L’Histoire a-t-elle donné raison à celles et ceux qui étaient contre la position pro-marocaine de Moroni sur le sujet Sahraoui ?
En revanche, l’on constate que le lendemain 16 décembre 2024, l’Algérie, pays frère des Comores et soutien de la République arabe sahraouie démocratique a exprimé sa solidarité envers les Comores à la suite du passage du cyclone Chido.
Dans une lettre officielle, l’ambassadrice d’Algérie à Addis-Abeba, Selma Malika Hadadi, a adressé ses condoléances au gouvernement comorien, qualifiant explicitement Maore d’« île comorienne ». Ce geste réaffirme le soutien constant de l’Algérie à l’intégrité territoriale des Comores et à leur lutte diplomatique pour la reconnaissance de leur souveraineté sur l’ensemble de l’archipel. Le Capitaine sankariste Ibrahim Traore, Président du Burkina Faso a fait le même geste en soutenant Moroni sur cette crise naturelle ayant secoué de plein fouet l’île comorienne de Maore.
Pourquoi le Raïs Mohamed VI adopte une posture ingrate envers Moroni ?
A-t-il omis que seul le Président comorien Ahmed Abdallah avait soutenu la position de son père Hassan II sur le Sahraoui, en 1982, lorsque le Maroc était désavoué par l’OUA, l’actuelle Union africaine ?
Les Comores ont toujours soutenu Maroc dans sa revendication sur le Saharaoui. D’ailleurs, le 15 novembre 2020, le Ministère comorien des Affaires étrangères et de la Coopération Internationale, était le premier à exprimer son soutien total au Royaume du Maroc dans ce « combat légitime et rend hommage à l’action héroïque des Forces Armées Royales. »[1]
Au nom du Chef de l’Etat, le Ministère de la diplomatie comorienne avait déclaré porter son soutien au Maroc sur le Saharaoui où les « Forces Armées Royales » faisaient face à l’obstruction de la circulation civile et commerciale au niveau de la frontière d’El Guergarat par les éléments de l’armée de résistance Polisario.
Doit-on lui rappeler que comme la revendication de Rabat sur Laâyoune, Moroni revendique aussi Maore qui fait partie intégrante de l’Union des Comores composée de 4 îles dont Maore (Mayotte), Mwali (Mohéli), Ngazidja (Grande-Comore) et Ndzuani (Anjouan).
Est-ce que le Maroc avait d’autres choix que de soutenir la France ? Savait-elle que l’indépendance comorienne demeure inachevée en raison de l’occupation de l’île comorienne de Maore par la France, ancienne puissance coloniale.
En réalité, Rabat a tout simplement soutenu Paris pour ses propres intérêts. Après, il faut l’admettre, les gouvernants comoriens, de fait, négligent de manière exagérée la question de l’île comorienne de Maore, depuis 1994 avec le retrait honteux de la question de Maore dans les débats des Assemblées Générales de l’ONU.
Mais là, trop c’est trop !
Le peuple comorien assiste sans force à la reconnaissance de Maore/Maore française par les pays voisins et frères.
Maroc vient compléter la triste liste longue des pays « frères » des Comores qui reconnaissent explicitement Maore française.
Le mécanisme se fait doucement, silencieusement et sûrement.
L’État comorien, par ricochet, le Ministère comorien des affaires étrangères, a failli à sa mission première, celle de veiller à la protection et la promotion des intérêts des Comores à l’étranger.
La question de Maore constitue la pierre angulaire de la diplomatie comorienne. L’île de Maore demeure une question d’intérêt général et capital des Comores depuis 1975 à ce jour.
Épisode 2 : Coopération entre Maore et Madagascar.
Le 1er juin 2022, une rencontre entre une délégation de Maore et de la province du Boeny à Madagascar avait conclu un accord pour l’importation de fourrage de la Grande île. Un nouveau pas dans le rapprochement entre Maore et Madagascar a été franchi le 25 juin, peut-on lire dans le Journal de Maore, avec la signature d’une convention de coopération entre Maore et 11 régions de Madagascar dont les régions Sofia, Vakinankaratra, Itasy.
Un communiqué de la Direction de la coopération économique de la présidence de la République de Madagascar a rendu compte de cet événement.
Madagascar « pays ami des Comores », reconnait officiellement Maore française en signant des accords de coopération directe avec cette île comorienne.
Aucune réaction du Ministère comorien des affaires étrangères dirigé à l’époque par M. Dhoihir Dhoulkamal sur ces accords qui sabotent l’intégrité territoriale des Comores.
Épisode 3 : Coopération entre Maore et Tanzanie.
Le 29 juin 2022, il y a eu une négociation à Maore d’un nouvel Accord de services aériens (ASA) avec la République unie de Tanzanie, pays ami des Comores. Les délégations mahoraise et tanzanienne ont négocié et trouvé un accord de coopération régionale.
Tanzanie, « pays ami des Comores », reconnait, aussi, de manière officielle Maore française en signant des accords de coopération directe avec cette île comorienne.
Aucune réaction du Ministère comorien des affaires étrangères de l’époque sur ces accords qui sapent, sans aucun, l’intégrité territoriale comorienne.
À la lumière des faits susmentionnés, en tant que citoyen comorien, on ne peut que lancer un appel à la démission de M. le ministre des Affaires étrangères des Comores, pour négligence avérée de la question de l’île comorienne de Maore.
C’est, enfin, un devoir solennel d’appeler le Gouvernement comorien, de fait, à convoquer les ambassadeurs de ces trois pays Maroc, Madagascar et Tanzanie pour avoir des explications sur cette violation de l’intégrité territoriale des Comores.
Dr. SAIF Youssouf Ahamada
Docteur en Sciences de l’Information et Communication à la Sorbonne.
ATER à la Sorbonne et ancien journaliste de l’ORTC et Africa 24.