ALFAJR QUOTIDIEN – Journal d'information quotidien comorien

Mlango Edition 23 « Des détournements de fonds, certes, il y a eus ». Et on recommence

La cour suprême a sonné le début des festivités en publiant la liste provisoire des candidats à l’élection présidentielle et gubernatoriale. Zéro surprise. On prend les mêmes et on recommence. L’argent coulera à flots, on le sait. La question se pose juste sur le timing et sur les personnes à même de s’occuper de ces détournements de fonds publics.

« Des détournements de fonds, certes, il y a eus ». Et on recommence.

Dans quelques semaines, l’argent va couler à flots. Et il n’est pas sûr que vous en voyiez la couleur pour les 5 ou 10 années à venir, dès les élections finies. Mangez donc. « Ye sisa Mdru Hama », comme ont dit les anciens, avant qu’il ne soit trop tard. La justice l’a déjà prouvé, notre classe politique n’a aucune limite quand il s’agit de faire gagner leur camp. On pille les caisses de l’Etat, sous la couverture de nos amis au gouvernement. Et on se laisse aller à un clientélisme flagrant, en distribuant des cadeaux à la veille des élections. Il est rarement question d’idées et de programmes établis. Une petite brochure à distribuer à gauche à droite, à qui s’y intéresse. Une liste de promesses sous un graphisme bien travaillé, à la limite du foutage de gueule. Et Hop ! Personne ne vote pour un programme, en tout cas pas le bas peuple, tellement affamé et assoiffé, que quelques billets d’Al-habib Said Omar suffisent à s’attacher leur soutien inconditionnel, semblent penser nos politiciens. Ne refusez surtout pas. Prenez en le maximum. Il vous appartient. Mais choisissez le bon. Pas le moins mauvais. Le meilleur. Parce qu’il nous faut le meilleur. Pas celui qui veut juste chasser Azali.

Aboudou SOEFO, ancien secrétaire général de la  CRC (principal parti au pouvoir), confirme un détournement orchestré par son ancien parti, dans un post Facebook, daté du 12 décembre 2017. « Des détournements de fonds, certes, il y a eus », affirme-t-il, serein. Il poursuit calmement, en donnant des détails bien précis sur la somme, le but et le commanditaire de ce détournement. « … 32 millions de nos francs décaissés aux hydrocarbures début 2006… ». Plus loin, « …Un détournement auquel j’ai participé avec d’autres camarades pour le compte de la CRC. ». Il précise enfin, que cette somme a servi à la campagne d’Ibrahim Halidi, candidat du CRC pour l’élection présidentielle. Et voilà la boucle est bouclée. SOEFO a purgé sa peine et payé sa dette à la république. Il s’est expliqué devant la justice et de manière publique.

Mais comme le colonel Azali Assoumani et son putsch, il lui restera toujours une dette morale envers le peuple comorien, pour avoir influencé négativement son avenir.

Il est très marrant d’observer le positionnement actuel des grands partis politiques, en premier lieu la CRC, « condamnée » par la justice, à travers ses cadres de l’époque. Il est affligeant de voir avec quelle facilité ces partis avancent leurs pions sans prendre en compte les condamnations passées. Le clientélisme est toujours légion, au vu et au su de tous. En témoigne l’opération « chaussure de foot », qui serait selon toute vraisemblance, lancée par le commissaire au plan, à la veille du double scrutin qui s’annonce. Une opération qui ressemble comme deux gouttes d’eau à celles des équipes du « Mzé Mwendza Mvu » alias Mamadou, qui ont offert des maillots de foot à certaines équipes, à la veille du scrutin de 2016.

La pratique est habituelle et connue de tous. À chaque période de vote, l’argent tombe littéralement du ciel. Et à chaque fois, ce sont les mêmes personnes qui reviennent, comme pour nous narguer. Les anciens membres de la CRC qui ont programmé le détournement, forment aujourd’hui pour la plupart, l’état-major de la « nouvelle » CRC et/ou du RADHI. Le mal est bien profond et ne se limite pas à quelques personnalités. Ils n’hésiteront pas à reproduire le schéma d’antan. Il s’agit tout de même de deux partis politiques d’envergure, qui jouent un rôle clé dans les Comores d’aujourd’hui. Le premier étant la propriété du président de la République, le deuxième ayant à sa tête, celui qui chuchote à l’oreille du président, Houmed Msaidié.

CRC, Radhi, UPDC, JUWA… Tous sans exception ont joué le jeu du clientélisme et pour certains du détournement de fond public, pour servir une campagne et pas seulement. Ils referont la même chose encore cette fois. Et pour toutes les fois qui viendront. Pour que ça change, c’est le système qu’il faut changer. Et pour ce faire, c’est toute cette classe politique qui doit sauter. Ce ne sera pas pour cette fois, malheureusement. Mais on ne désespère pas. En attendant, soyons intègres, soyons citoyens, soyons Comoriens, et le meilleur suivra.

 

Khaled SIMBA

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